RMC
Sciences Nature

Saint-Malo: un nouveau bateau-usine symbole de la pêche intensive fait polémique

placeholder video
La Compagnie des pêches de Saint-Malo a investi dans un bateau considéré comme le plus grand chalutier du monde. Sur place, petits pêcheurs, associations et élus sont dans l'incompréhension et manifestent contre la folie des grandeurs.

Polémique en Bretagne autour du nouveau navire de la Compagnie des pêches de Saint-Malo. Pour remplacer un chalutier vieillissant, l’entreprise a investi 15 millions d’euros sur l’Annelies-Ilena, propriété d'un armement néerlandais, considéré comme le plus grand chalutier du monde avec ses 145 mètres de long.

Un bateau usine, capable de pêcher 400 tonnes de merlan bleu par jour, transformé directement à bord en pains de poissons surgelés, destinés in fine à être transformés en bâtonnets de surimi dans une usine à Saint-Malo. Pour ses détracteurs, c’est un symbole de la course au gigantisme de la pêche industrielle.

Un navire si grand que ses dimensions ne lui permettent pas de pénétrer dans le port de Saint-Malo. Il débarquera sa production aux Pays-Bas, avant qu'elle soit ramenée par conteneurs à Saint-Malo pour fabriquer 3.000 tonnes de surimi par an.

Un gigantisme qui interpelle

Des associations environnementales et des pêcheurs artisanaux sont venus manifester ce jeudi sur le port de Saint-Malo. Cette folie des grandeurs inquiète Nathan, pêcheur à son compte.

"Quand je vois qu'on arrive à ça alors que nous, on nous limite nos quotas... J'ai le droit à 100 kilos par jour de maquereau... Il me faudrait 70 ans pour pêcher ce qu'ils pêchent en une journée", illustre-t-il.

Pêche: manifestation au port de Saint-Malo le 15 février
Pêche: manifestation au port de Saint-Malo le 15 février © RMC

Si ce chalutier n'appartient pas totalement à la compagnie des pêches de Saint-Malo et ne va pas pêcher le même poisson que Nathan, c’est tout un modèle économique qui est critiqué. Notamment par l’association de lutte contre la destruction de l'océan "Bloom", qui insiste sur l'incohérence de l'acheminement de cette pêche depuis les Pays-Bas. "Tout ça pour fabriquer du surimi industriel. Est-ce que le surimi industriel permet la souveraineté allimentaire? Non", tacle Laëtitia Bisiaux, de l'association.

Des élus et associations qui lancent un appel au président de la région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, car la feuille de route sur la politique de la pêche dans la région doit être approuvée ce vendredi au Conseil régional.

"Il n'y a pas de concurrence directe avec les navires côtiers"

Mais les opposants se trompent de cible, estime de son côté Philippe Orveillon, président du comité des pêches d’Île-et-Vilaine. "C'est un modèle qui paraît gigantesque comme ça, mais le bateau pêche dans des zones très éloignées des côtes", tente-t-il de rassurer.

"Il n'y a pas de concurrence directe avec les navires côtiers. C'est très suivi, il y a des quotas européens qui sont attribués à ces bateaux-là", rappelle-t-il.

La Compagnie des pêches de Saint-Malo assure que ce nouveau navire pêchera la même quantité de poisson qu’avant.

Martin Cadoret (édité par J.A.)