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Crise de l’eau à Mayotte: pourquoi la situation est aussi grave

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Dans "Apolline Matin" ce vendredi sur RMC et RMC Story, Nicolas Poincaré se penche sur la crise de l’eau à Mayotte. Un département français privé d’eau en moyenne deux jours sur trois.

L’Etat va prendre en charge les factures d’eau à Mayotte. Elisabeth Borne l’a annoncé ce jeudi soir: les habitants du département d’Outre-mer ne seront plus facturés jusqu’au mois de décembre. Dit comme cela, cela ressemble à un cadeau. En réalité, c’est bien le moins de ne plus payer pour l’eau du robinet, tout simplement parce qu’il n’y en a pratiquement plus. Depuis un mois, la population de Mayotte est privée d’eau en moyenne deux jours sur trois. Et lorsque l’eau courante revient le troisième jour, elle est d’abord marronnasse puis impropre à la consommation. Les autorités préconisent de la faire bouillir avant de la boire ou de s’en servir pour se brosser les dents…

Du coup, les gens se ruent sur l’eau minérale en bouteille. Mais les prix ont explosé et il faut compter aujourd’hui 2 euros pour la bouteille la moins chère, contre 50 centimes en métropole. Cela fait 12 euros le pack de six bouteilles, des prix inabordables pour la majorité des habitants du département le plus pauvre de France. Le salaire moyen à Mayotte s'élève à 1.042 euros, mais plus de 40% de la population vit avec seulement 160 euros par mois.

Résultat, beaucoup boivent de l’eau non potable et se plaignent de maux de ventre. La préfecture distribue des bouteilles gratuites à environ 50.000 personnes, parmi les plus vulnérables. Ce chiffre devrait rapidement doubler, pour atteindre 100.000 personnes. L’eau viendra de l’île de la Réunion ou de métropole et sera distribuée par les militaires. Il est prévu notamment des distributions dans les écoles.

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Expliquez-nous par Nicolas Poincaré : Mayotte, l'Etat prend en charge les factures d'eau - 06/10
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La sécheresse et l’immigration parmi les causes

Qu’est-ce qui explique ces pénuries? D’abord la sécheresse, la plus sévère depuis 25 ans, sans doute due au réchauffement climatique. Autrefois, la saison des pluies commençait en octobre, désormais c’est de plus en plus tard. Jusqu’en janvier parfois… Résultat, les deux réservoirs collinaires de l'île sont presque vides. L’autre raison, c’est la démographie. Mayotte est un des territoires du monde où la population a le plus explosé. Il y avait 67.000 habitants en 1985, 310.000 aujourd’hui. Une progression de 450% en moins de 40 ans. Cela s'explique par un très fort taux de natalité et par une très forte immigration, venant des îles voisines des Comores. Un habitant de Mayotte sur deux est aujourd’hui un étranger, et la moitié d’entre eux des immigrés clandestins.

L'État se retrouve débordé, à tous points de vue. En termes de sécurité, le niveau de violence est inouï. En termes d'éducation, un instituteur à Mayotte peut avoir jusqu'à 70 élèves. Il en prend 35 le matin et 35 l'après-midi. Et l'État s’est aussi laissé déborder par l’explosion de la demande en eau. Les deux barrages de réserves sont trop petits. La seule usine qui dessale de l’eau de mer ne suffit pas. Il y a un projet de construction d’un troisième réservoir et d’une deuxième usine de désalinisation. Mais comme toujours à Mayotte, tout est toujours beaucoup plus lent qu’annoncé avec un mélange d'incompétence, d'imprévision et de corruption. Le parquet financier a mené une enquête sur les syndicats des eaux de Mayotte pour favoritisme et détournement de fonds publics.

Voilà le tableau de ce que subit le 101e département français. La pauvreté, la violence, la surpopulation et maintenant la sécheresse. Sur France 24, un ancien ministre des DOM-TOM, Yves Jégo, a résumé la situation: "Elle est inexcusable et inconcevable. Aucun autre département français n’accepterait de vivre le quart de la moitié de ce que vivent les Mahorais".

Nicolas Poincaré