Drogue au lycée: "Les tests salivaires ne nous apprendront que des données statistiques"

C'était une promesse de campagne de Valérie Pécresse, la nouvelle présidente de la région Ile-de-France. La Région a adopté jeudi 19 mai le principe controversé de financer des tests salivaires de détection de drogue comme outil de prévention contre la toxicomanie dans les lycées franciliens.
Aucun budget n’a encore été fixé car on ignore combien d'établissements se lanceront dans ces tests. Ils coûtent entre 10 et 12 euros à l'unité et la Région propose de les financer. L’objectif de ces tests sera de lutter contre les addictions, source de décrochage scolaire. La Région va en effet demander à chaque établissement d'établir un diagnostic sur la consommation des substances addictives.
Questions juridiques
Le conseil d'administration de chaque lycée pourra alors utiliser ces tests de dépistage comme des outils de diagnostic. Ils seront menés sous couvert du secret médical. Reste à savoir si les lycées seront séduits par cette idée et appliqueront réellement ces tests, qui suscitent déjà la polémique. “On peut être sceptique sur l’idée que beaucoup se précipiteront”, explique Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN-UNSA, principal syndicat des personnels de direction de l’Education nationale.
“Cela suscite quand même un certain nombre de difficultés, comme des réactions éventuellement très hostiles de membres de la communauté éducative”.
La décision reviendra en effet aux conseils d'administration des établissements, qui sont composés à la fois du proviseur, des enseignants et des parents d'élèves... Or il n’est pas certain qu'ils soient très nombreux à voter en ce sens.
Comme le rappelle Philippe Tournier, l’utilisation ou non de ces tests posera aussi des questions d’ordre juridique :
“En cas de vol dans une classe, l’établissement n’a pas le droit de regarder dans le sac des élèves, donc on s’étonnerait un tout petit peu qu’ils puissent en toute impunité imposer des tests salivaires aux mêmes élèves.”
Proposer sans imposer
En effet, ce sont les officiers de police dans le cadre de procédures judiciaires qui peuvent réaliser habituellement ces tests. Les proviseurs s'en inquiètent, mais la Région élude la question en insistant sur le fait qu’elle n’imposera rien, et en les présentant comme un outil de prévention.
Les tests seront vraisemblablement réalisés par la médecine scolaire, les résultats seront communiqués directement aux lycéens majeurs, à leurs parents s'ils sont mineurs. Mais les proviseurs n'auront que des résultats globaux et anonymes, et cela leur permettra d'avoir une idée plus précise de la situation dans leur lycée, selon la Région. Dans quel but ensuite ? La Région ne le dit pas.
“Il faut faire preuve de pragmatisme, conclut Philippe Tournier. Il n’y a pas de raison de rejeter a priori l’idée des tests, mais les tests ne nous apprendront que des données statistiques et ce n’est pas la simple découverte de ce chiffre qui règlera le problème de la toxicomanie."