Pour le maire de Melun, le débat sur les crèches de Noël prouve "un état de malaise identitaire alarmant"

- - AFP
Louis Vogel, maire LR de Melun
"Je suis légaliste, il faut donc respecter cette décision. Le Conseil d’Etat dit le droit, il s’agit de la plus haute juridiction administrative française. De fait, nous respectons cette décision, nous en prenons acte et nous allons nous plier aux conditions posées par le Conseil d’Etat.
S’il est vrai que la décision rend possible l’installation de crèche dans les bâtiments publics, nous pouvons en déduire tout et son contraire. Force est de constater que les critères posés demeurent ambigus.
En effet selon la décision, il faut tenir compte:
- Du contexte de l’installation: celui-ci doit être dépourvu de tout élément de prosélytisme ;
- Des conditions particulières de l’installation ;
- De l’existence ou de l’absence d’usages locaux ;
- Du lieu de l’installation.
"Un état de malaise identitaire alarmant"
Aucun cap clair n’est posé. Les critères sont artificiels et flous. Je ne peux que regretter que la solution préconisée par le rapporteur qui avait le mérite de la clarté n’ait pas été retenue.
Pendant des années, des crèches étaient installées dans toutes les mairies de France sans qu’aucun problème ne se pose. Cela démontre l’état de notre pays aujourd’hui, un état de malaise identitaire alarmant.
Si l’on était plus sûrs de nos valeurs, plus conscients de ce qui nous réunit, nous n’aurions même pas ce débat, je ne serais pas là à vous convaincre qu’une crèche est un élément de culture, de tradition et non de culte.
"Dans le cadre de la laïcisation de la fête de Noël, la crèche ne s'expose plus simplement dans les églises"
Les crèches de Noël se sont développées en Europe à partir du XIIIe siècle dans le cadre d'un des aspects saillants de la théologie franciscaine, à la suite de la réalisation d'une crèche vivante par François d'Assise en Italie, la nuit de Noël 1223.Elle a toujours été l'occasion d'exprimer la piété populaire lors de cérémonies liturgiques et populaires.
Dans le cadre de la laïcisation de la fête de Noël, la crèche ne s'expose plus simplement dans les églises, mais aussi dans les maisons, les bâtiments publics voire les centres commerciaux et prend désormais une tournure plus folklorique en incluant des éléments comiques, des légendes et des éléments locaux propres à chaque région ou pays (les santons de Provence!)
Elément culturel donc. Du reste, ce n’est pas en abandonnant son histoire que l’on construit l’avenir comme d’ailleurs ce n’est pas en se focalisant sur les temps passés que l’on arrivera à apaiser le pays. Tout est question de mesure.
"Important de ne pas se laisser impressionner par certaines associations"
Est-ce que je compte tout de même l'installer cette année? Oui. Je crois qu’il est important de ne pas se laisser impressionner par certaines associations qui ne représentent pas l’opinion de la plupart des Melunais, des Français.
Ce débat revient chaque année alors qu’il existe, je pense, des problèmes plus importants dans notre pays. Nous allons l’installer et nous conformer à la décision rendue.
Nous allons inclure la crèche dans le cadre de nos festivités locales, y inclure des personnages locaux, la déplacer dans les jardins. Dans cette optique nous pensons qu’elle sera conforme à la décision prise par le Conseil.
Vous savez, je partage les valeurs de laïcité dans la République, il est cependant important qu’elles ne se manifestent pas dans une sorte de sentiment antireligieux. Dans nos temps troublés par l’insécurité et le terrorisme, l'époque n'est pas au déracinement de nos concitoyens.
L'abandon de toutes nos traditions et la coupure avec nos racines culturelles sous prétexte de respecter la laïcité n’est pas, je crois, l’esprit de la loi de 1905. Celle-ci affirme une volonté d’établissement de la paix religieuse par la protection de libertés fondamentales: la liberté personnelle côtoie la liberté collective religieuse. En aucun cas, marque-t-elle le renoncement à nos traditions populaires et à notre culture."