Culpabilité, épuisement... pourquoi les soignants des urgences du Mans débutent une grève illimitée

Jeudi noir aux urgences du Mans. Médecins, infirmiers, aides-soignants, secrétaires… Tout le service des urgences commence ce jeudi une grève illimitée. Une action est aussi prévue à 14h30 devant l'hôpital.
Comme ailleurs en France, les urgences sont en difficulté à cause d’un manque de personnel. Mais depuis plus d’un an, de nombreux patients relevant de la psychiatrie s’ajoutent et stagnent dans les couloirs, faute de lits et de médecins psychiatres ailleurs. En plus des patients habituels, chaque jour, une vingtaine de patients relevant de la psychiatrie remplissent les couloirs des urgences. Une situation intolérable pour les soignants.
Comme les autres, ils dorment parfois par terre, attendent sans intimité, sans visite. Mais ils sont plus fragiles que les autres, souffle Pierre.
“Ils ruminent, ils tournent en rond dans un secteur plus ou moins fermé”, explique-t-il.
Les plus agités sont contentionnés, c’est-à-dire attachés à un lit, et sédatés, explique l’infirmier avec peine. “On arrive à banaliser le fait d’attacher des gens faute de place”, dénonce-t-il.
"C'est épuisant"
Car le département manque de psychiatres et de lits d’hospitalisation spécialisés. Ils stagnent aux urgences sans personnel formé, sans soins adaptés. “Là, il y a des patients qu’on arrive à avoir pendant deux semaines pour de la psychiatrie. Ils ressortent, mais on sait très bien qu’ils vont revenir, ou alors ils vont se faire du mal à eux ou des fois aux autres. Mais oui, il y a de la culpabilité. C’est épuisant, vraiment”, confie Pierre.
Quelques larmes avant de repartir dans les couloirs bondés. Le chef de service alerte, ces urgences sont les seules dans la Sarthe ouvertes tous les jours, toute la journée.
“Les autres missions comme prendre en charge un infarctus, un AVC, un accident de la route, on est moins à même de le faire. Toute la filière de médecine d’urgence du département se trouve dégradée. Si cette mobilisation-là, elle ne produit rien, il ne restera plus rien à part la fuite. La résignation n'est pas acceptable”, pointe-t-il.
La direction et l'ARS ont bien tenté de trouver des solutions, en transférant des patients, en proposant des incitations financières, mais les psychiatres manquent toujours. Les syndicats confient leur impuissance et en appellent au ministère de la Santé.