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"Des patients restent alités toute la journée parce qu'on n'a pas assez de personnel": Orpéa et Korian, géants des Ehpad, accusés de maltraitance

Témoignage RMC. Depuis plusieurs années, Nora Sahara, ancienne infirmière en maison de retraite, dénonce les défaillances dans les Ehpad.

Une grosse chute. Les deux géants français des maisons de retraite ont vu leur cours chuter en bourse ce lundi. Le titre d'Orpéa a perdu 16% de sa valeur avant que son cours soit suspendu à la demande du groupe. Son concurrent Korian affichait lui à la clôture des marchés une perte de valeur de 14%.

Les investisseurs ont sanctionné les deux spécialistes de l'immobilier dans le secteur de la santé après les révélations du journaliste Victor Castanet dont le livre "Les fossoyeurs" paraît ce mardi. Pendant trois ans, le journaliste indépendant a enquêté sur les Ehpad et leur business.

Il a rencontré plus de 250 personnes. Il dénonce des défaillances systémiques avec des résidents rationnés ou laissés sans soin durant des jours. Victor Castanet pointe des prises en charge médicales faites à la va-vite, des couches et des repas rationnées pour plus de rentabilité. Le groupe Orpéa, leader mondial des Ehpad, y est particulièrement visé.

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"Des patients ne déjeunent pas, faute de personnel"

Des révélations qui ne surprennent pas Nora Sahara. Cette ancienne infirmière dénonce depuis des années les défaillances dans les Ehpad. En 15 ans de métier dans le soin, elle a travaillé dans les principaux groupes qui tiennent le secteur des Ehpad, groupes qui ont un point commun: "L'objectif c'est de dépenser moins et gagner plus".

Son quotidien d'infirmière lui fait réaliser que cette course à la rentabilité se fait au détriment des résidents:
"On a des patients qui restent alités toute la journée parce qu'on a pas assez de personnel pour les descendre en salle à manger. Il y a des patients qui ne déjeunent pas, faute de personnel pour leur monter le déjeuner. On a des patients qu'on n'hydrate pas et à qui on donne des gelées parce qu'on n'a pas de poche d'hydratation. Il y a aussi des pansements qu'on ne fait pas dans les protocoles parce qu'on n'a".

"Je ne mettrai jamais un de mes parents en maison de retraite"

Une prise en charge déficiente qui se fait dans le dos des familles: "Vous ne verre aucune soignante dire à une famille: 'Votre mère est tombée parce qu'on n'avait pas assez de soignants'. Jamais on n'aura ça mais c'est la réalité".

Epuisée après la 1ère vague du Covid-19, Nora Sahara décide à contrecœur de quitter son métier d'infirmière: "J'ai fait ce métier, j'avais l'idée de faire de l'humanitaire mais quand je suis arrivée sur le terrain, je me suis demandé où on allait. Je ne mettrai jamais un de mes parents en maison de retraite". Aujourd'hui journaliste, elle enquête sur les défaillances du système de soin français.

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Victor Joanin (avec Guillaume Dussourt)