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Grève massive des pharmacies: "Les pharmaciens ne sont pas des nantis"

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Les pharmacies sont en grève ce jeudi 30 mai afin de dénoncer entre autres les fermetures d'officines en France et la pénurie de médicaments. "Environ 90%" sont fermées, a indiqué sur RMC Alain Grollaud, président du syndicat des groupements de pharmaciens, qui assure que les professionnels ne "sont pas des nantis".

Les pharmacies sont en grève ce jeudi afin de dénoncer la hausse constante des fermetures d'officines en France ainsi que la pénurie de médicaments. "C'est un très gros succès, environ 90% des phamarcies sont fermées et il y a beaucoup de manifestations dans plus de 40 villes de France", a indiqué ce jeudi à mi-journée sur RMC, dans Les Grandes Gueules, Alain Grollaud, président du syndicat des groupements de pharmaciens.

Le témoignage du jour – Alain Grollaud, président du syndicat des groupements de pharmaciens : "C’est une fausse idée de croire que les pharmaciens sont des nantis" - 30/05
Le témoignage du jour – Alain Grollaud, président du syndicat des groupements de pharmaciens : "C’est une fausse idée de croire que les pharmaciens sont des nantis" - 30/05
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Si plusieurs manifestations ont eu lieu ce jeudi matin en France, "on démarre la manifestation cet après-midi (à 15h30, NDLR) à Paris devant la faculté de pharmacie pour aller jusqu'à Bercy, on espère être reçu par le ministère pour exposer nos revendications", a-t-il par ailleurs déclaré.

Le mouvement rassemble tous les représentants de la profession: syndicats, groupements de pharmaciens, étudiants. La grève n'est pas habituelle dans ce secteur, la dernière d'ampleur remonte à dix ans.

Les raisons de la pénurie de médicaments

"On parle de réindustraliser le pays, pourquoi pas, mais tous les ans, pour le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale (PLFRSS), il y a une seule variable d'ajustement, c'est le prix du médicament. Plus on assèche et on fait baisser le prix du médicament, moins les laboratoires viennent sur le marché. Certains se désengagent. C'est la raison principale", a exposé Alain Grollaud à propos de la pénurie.

Le professionnel a également expliqué que l'"industralisation et production de matières premières se font en Inde et en Chine". "On a plus de principes actifs, c'est au plus offrant. Si une société indienne ou chinoise ont des payeurs plus importants, ils vont leur vendre", a-t-il regretté.

"On passe une demi-journée par semaine à essayer de trouver des traitements pour les gens, ce qui est une perte de temps", a déploré Romain, auditeur RMC et préparateur en pharmacie.

"Grosses difficultés financières" chez les pharmaciens

Alain Grollaud a également tenu à battre en brèche les "inepties" autour des pharmacies et des professionnels du secteurs. "Les pharmaciens ne sont pas des nantis", a-t-il vivement réagi après les propos de Medhi Ghezzar, chroniqueur dans Les Grandes Gueules, qui a estimé que les officines "n'étaient pas à plaindre", et "qu'elles s'étaient fait un pognon de fou" pendant la crise sanitaire.

"Economiquement, il y a de grosses difficultés financières" a tenu à rappeler Alain Grollaud, qui tiennent selon lui du fait de la non-revalorisation des actes et des honoraires ainsi que les conséquences de l'inflation et de l'énergie. "Quand vous comparez les actes, c'est absoluments scandaleux. Pour le même travail, on est payé trois, quatre fois moins cher" que les médecins. "C'est le gouvernement qui a les clés", a lancé le président du syndicat des groupements de pharmaciens.

"Le métier ne passionne plus"

De plus, les gérants de pharmacies font face au "phénomène sociétal" des jeunes "qui ne sont pas prêts à passer autant de temps" au travail, du fait d'une grande amplitude horaire. "Si on doit prendre des employés pour pallier à ce manque, c'est un problème économique", a-t-il détaillé.

Mais les officines ferment inexorablement en France, faute de repreneurs. "On va se heurter à une désertification pharmaceutique comme on a connu la désertification médicale", a mis en garde Alain Grollaud. "Aujourd'hui, c'est une pharmacie qui ferme par jour. Plus de 300 ont fermées ces derniers mois".

"Le métier ne passionne plus", a abondé Romain, préparateur en pharmacie. "La seule personne qu'on a réussi à recruter, c'est un pharmacien de 69 ans, a-t-il confié. J'ai repris une pharmacie il y a cinq, six ans en milieu rural, et ça fait trois ans que je n'ai pas pris de vacances."

"Je ne suis pas loin du Smic"

"Ramené au taux horaire, ce que je fais dans ma semaine et ce que je paie, je ne suis pas loin du Smic", a expliqué Nicolas, auditeur RMC et phamarcien, qui a rappelé que la profession était "payée par la Sécu".

"85% de mon chiffre d'affaires est lié à l'ordonnance, je n'ai que des personnes âgées", a-t-il poursuvi, expliquant que la parapharmcie n'était pas la source principale de ses revenus. "Je ne me plains pas, j'arrive à m'en sortir mais j'ai beaucoup investi et on a externalisé beaucoup de choses pour gagner en autonomie et être présent au comptoir devant le patient et avoir du temps pour nos nouvelles missions", a-t-il détaillé.

Léo Manson