"Mes patients ne sont pas morts dans de bonnes conditions à cause du coronavirus": le quotidien éreintant des infirmières à domicile

Nous avons suivi Nora, infirmière libérale dans le Val-de-Marne, qui vit ses journées comme un sprint. Dans des conditions rendues encore plus difficiles en raison du coronavirus.

Depuis le début de la crise sanitaire, les infirmières à domicile sont souvent le dernier rempart à l'isolement. En temps normal, pour maintenir une personne âgée chez elle, c'est tout un réseau qui se met en place.

Mais, depuis le début du confinement, en l'absence des proches, des kinés ou encore des auxiliaires de vie. les infirmières libérales doivent tout gérer au quotidien. Quitte, parfois, à ne plus avoir le temps de prendre soin comme elles le voudraient de leurs patients.

Le quotidien à 100 à l'heure de Nora dans le Val-de-Marne

Nous avons suivi la tournée de Nora, à Choisy-le-Roi, dans le Val-de-Marne. Dans le salon de Ginette, la seule présence, c'est la télévision, volume à fond. Personne ne vient, à part Nora, deux fois jour. Elle vérifie que les médicaments et les repas sont avalés.

"Ca, normalement on ne le fait pas, on ne fait pas à manger. Mais on n'est pas le "faux" infirmier, on est dans l'accompagnement des gens à domicile."

Depuis le début de l'épidémie ses missions se multiplient. Cette infirmière libérale passe à la pharmacie pour certains malades, à la boulangerie pour d'autres... Et chez Jean-Pierre, tétraplégique, elle pallie l'absence des kinés.

"Je surveille toutes les zones d'appuis, comme il est beaucoup moins mobilisé il a plus de risques d'avoir des escarpes."

Quelques rues plus loin. Nora s'occupe de la toilette de Marie-Louise. Au lit, son mari Isauro la regarde faire, avec reconnaissance. Quatre de ses patients sont décédés chez eux la semaine passée, dont un atteint du Covid-19.

"Ces patients que j'ai perdu ne sont pas morts dans de bonnes conditions à cause du coronavirus"

En plein confinement, Nora regrette de ne pas avoir pu les accompagner comme elle l'aurait souhaité.

"Ca a été une semaine très éprouvante. Ces patients que j'ai perdu ne sont pas morts dans de bonnes conditions à cause du coronavirus. La solitude on la ressent chez eux, on a beau faire ce qu'on peut, on ne remplace pas tout le monde."

Comme Nora, chaque jour, environ 11.000 infirmières et infirmiers libéraux continent de veiller sur leurs patients à domicile.

Marie Monier et Caroline Philippe (avec J.A.)