Ses sextoys connectés ont été censurés par le concours Lépine: "on n'est pas une plateforme porno"

- - B. Sensory
Christel Le Coq, fondatrice de la start-up brestoise E.Sensory qui commercialise notamment le sextoy connecté Little Bird:
"Il y a quelques mois, j'ai passé un casting pour une boîte de production qui organise une émission de télé pour M6 sponsorisée par une grande enseigne de distribution. L'objectif de cette émission est de mettre en avant des inventions, des créateurs. L'enjeu est de gagner un contrat de distribution dans cette enseigne. On m'a rappelé il y a quelques semaines pour me dire que j'avais été sélectionnée pour présenter mon setxoy connecté, le Little Bird.
"Il s'agissait d'une formidable opportunité"
On m'a indiqué que l'émission serait tournée pendant la Foire de Paris et qu'il fallait que je remplisse un dossier du concours Lépine. Quinze jours avant le début du tournage, la boîte de production m'a fait savoir que, comme ils avaient loué l'espace pour toute la durée du salon, ils laissaient des stands aux candidats pour que l'on puisse exposer nos produits. Il s'agissait donc d'une très belle opportunité pour tout le monde, et plus précisément pour nous, petite start-up brestoise.
Le tournage a eu lieu la semaine dernière, de mercredi soir à samedi soir, mais à la fin de celui-ci, on m'a fait savoir que, à la demande du concours Lépine, je ne pouvais pas restée là comme prévu. La raison étant que dans le règlement de ce concours, les dossiers concernant des inventions, des innovations liées à l'érotisme ou au sexe sont refusées. Les autres candidats, avec leur table-braséro, leur WC-aquarium ou autres pieds de lit lumineux, pouvaient rester sans problème. Mais le Little Bird, parce qu'il s'agit d'un sextoy connecté, ne peut pas y être.
"On voit des choses bien plus trash à la télévision"
Je comprends tout à fait la démarche du concours Lépine, même si je trouve leurs règles un peu obsolètes. Mais, une fois que l'on était là, installés, que l'on avait fait acheminé nos produits, je trouve dur de nous faire partir comme ça, en cinq minutes. Pour des gens qui veulent mettre en avant des personnes qui innovent, c'est un manque de respect. Moi, ça m'a demandé du temps, j'ai engagé un peu de frais et, soyons honnêtes, c'était aussi une opportunité de vendre des produits.
Je sais que je n'avais pas payé et que rien ne m'était dû mais une fois que tout était organisé et que l'on s'était engagé à nous laisser cet espace, je trouve que de nous demander de partir pour ce motif-là est un peu old school. Pourtant, on parle de sextoys connectés à un catalogue de lectures érotiques, un produit rose, design, pas du tout figuratif. Si un enfant passe devant, il ne sera pas choqué parce qu'il ne saura pas de quoi il s'agit. S'il y a bien une offre érotique qui n'est pas sulfureuse, c'est bien la nôtre. C'est quelque chose de soft et, en 2017, je pense qu'on voit des choses bien plus trash, plus osées à la télévision. Il y a donc des mondes à plusieurs vitesses…
"On est en 2017, est-ce qu'on ne pourrait pas aborder ce type de sujet plus simplement?"
Je sais bien que tout le monde n'est pas à l'aise sur ce genre de sujet mais, pour autant, fallait-il aller jusqu'à renvoyer chez elle une entreprise venue présenter un nouveau produit, pourtant primé lors du CES de Las Vegas en 2016? Je ne sais pas. Je pense aussi que les gens du concours Lépine auraient pu venir me voir directement plutôt que d'envoyer les gens de la production. On aurait pu se parler entre adultes alors que là je n'ai pas pu me défendre. C'est dommage. On est en 2017, est-ce qu'on ne pourrait pas aborder ce type de sujet plus simplement? On n'est pas une plateforme porno.
Mais ce n'est pas la première déconvenue que j'ai avec ce projet, je suis habituée. Sur le moment, ça me met en colère. Après, ça me fatigue et ensuite ça me redonne du courage pour essayer de réussir. On est dans une situation pas facile, on a eu pas mal de problèmes de production, c'était donc une belle opportunité d'autant plus qu'on n'a pas le droit de faire de publicité sur les réseaux sociaux… Après, c'est ma vie, mon projet, mes tripes depuis deux ans donc forcément je suis touchée."