Agriculture: comment lutter contre les aléas climatiques grâce à la technologie
On a tous vu les images des petites chaufferettes utilisées pour tenter de préserver les vignes, notamment. Effort désespéré et très compliqué à mettre en place: installer ces bougies sur plusieurs hectares, c’est un cauchemar même si ça a longtemps été la seule solution relativement efficace. Depuis quelques années, les agriculteurs, qui sont régulièrement confrontés à ce problème de météo, commencent à faire appel à des solutions plus technologiques, parfois assez étonnantes. En Bourgogne par exemple, certains utilisent désormais un "tow and blow", une invention néo-zélandaise qu’on pourrait décrire comme un gigantesque ventilateur mobile chauffant. Une sorte de grosse éolienne inversée, harnachée à un bras mobile, le tout tiré par un tracteur ou même une voiture, qui va se balader dans les récoltes pour souffler de l’air chaud.
Plus précisément, on va rabattre l’air chaud en hauteur vers le sol froid et préserver les récoltes. Vous avez des modèles fixes, qui sont assez massifs et qui ressemblent vraiment à des éoliennes, et puis des mobiles, dont la portée est un peu moindre. Avec l’une de ces machines, on peut quand même couvrir une parcelle de 4 hectares. Autre solution : des canons à air chaud, des sortes de sèche-cheveux géants qu’on balade dans les parcelles et qui vont souffler sur les plants. Dans le même esprit, un projet de drone agricole, le Protégel, conçu par un agriculteur de Corrèze, qui embarque des brûleurs. Il va faire un peu comme les chaufferettes, sauf qu’il est mobile et qu’il peut aller réchauffer les plants les uns après les autres. Quant aux chaufferettes, des modèles connectés commencent à faire leur apparition (Wineprotect). Equipées de capteurs et de panneaux solaires, elles sont autosuffisantes et se déclenchent automatiquement en cas de besoin pour faire remonter la température de 7°C.
Des ombrières intelligentes
Et il n’y a pas que le gel qui peut inquiéter les agriculteurs. Dans quelques mois, ce sera les fortes chaleurs... Et là aussi, il y a des solutions. Une autre innovation assez géniale et qui fonctionne aussi bien pour lutter contre le gel que contre la sécheresse, c’est l’œuvre d’une startup française qui s’appelle Ombrea, basée à Aix-en-Provence. Elle a mis au point des ombrières intelligentes. De grands panneaux amovibles, comme des volets, qu’on va placer au-dessus d’une exploitation, de tomates ou une vigne par exemple, et couplés à des capteurs qui recueillent les données météo.
En fonction de l’ensoleillement, de l’humidité, du froid, du type de culture, ces panneaux vont s’ouvrir et se refermer, afin de moduler de manière extrêmement précise l’ombrage au sol. En clair, le dispositif va protéger de la grêle ou du grand froid, mais aussi quand le soleil tape trop fort : on va créer une sorte de microclimat pour optimiser la pousse en fonction de chaque plante. Résultat : on obtient plus de fruits et légumes en consommant moins d’eau, on évite les cultures brûlées par le soleil ou décimées par le gel ou la grêle... On pourrait se dire que ça coûte cher. Là où c’est très malin, c’est que ces gros panneaux amovibles sont bardés de panneaux solaires, qui vont produire de l’énergie revendue au réseau et qui finance l’investissement.
Des bulletins météo à l’échelle de la parcelle
Lutter contre les aléas climatiques, c’est bien. Mais les anticiper, c’est encore mieux. Là aussi, les "ageekulteurs" ont des solutions. Injecter de l’intelligence dans les exploitations. Dans le cas du gel, c’est par exemple de prévoir précisément, presque au mètre près, à quel moment et où il va frapper. Pour ça, on va utiliser des capteurs électroniques, des mini stations météo, qui prennent la forme de tuteurs qu’on met sur la parcelle et qui vont faire remonter tout un tas d’informations stratégiques vers le smartphone ou l’ordinateur de l’agriculteur. Des bulletins météo à l’échelle de la parcelle, avec des données pluviométriques, hygrométriques, un relevé tous les quarts d’heure pour prévenir du risque de gel.
Et ces données ultra précises sont des outils d’aide à la décision extrêmement précieux, sous forme d’alertes envoyées directement sur le smartphone, comme un push d’une chaîne d’information. Car ces capteurs permettent de savoir exactement quand irriguer et en quelle quantité, savoir exactement à quel moment optimal il faut semer ou récolter, quelle quantité de fongicides, herbicides ou pesticides il faut mettre et à quel endroit… Il ne s’agit pas de dire qu’on va les supprimer complétement, mais on en utilise beaucoup moins. Ça permet de planifier le travail de manière beaucoup plus précise, de gagner en efficacité… On entre dans ce qu’on appelle l’agriculture de précision.