Une de Charlie Hebdo après les attentats de Bruxelles: "Elle ne me fait pas rire mais ne me choque pas"
Charlie Hebdo aime faire réagir, susciter le débat. C'en est même son moteur, sa raison de vivre. Et ce jusqu'à susciter la polémique. Force est de constater que l'hebdomadaire satirique sait faire parler de lui. Par exemple, au lendemain des attentats du 13 novembre à Paris, le journal avait ironisé sur l'attaque des terroristes qui avait fait 130 morts en titrant en Une "Ils ont les armes, on les emm***, on a le champagne !". Une couverture qui avait beaucoup parler tout comme celle après l'attaque des frères Kouachi qui avait décimé la rédaction du journal le 7 janvier 2015.
Sorti en kiosque ce mercredi, Charlie Hebdo fait de nouveau polémique en raison de sa dernière Une. Il s'agit d'un dessin de Riss qui a choisi d’illustrer les attentats de Bruxelles avec le chanteur Stromae entouré de membres tailladés et charcutés sur un drapeau belge. "Papa où t'es?" demande l'interprète du tube planétaire Papaoutai. "Ici", "Là", "Et là aussi", répondent en chœur des bouts de corps. Une couverture qui choque une partie de la population belge.
"Le dessin de presse a un rôle cathartique"
"Je n'aime pas cette Une mais de là à dire qu'elle me choque, il y a un grand pas, souligne ce mercredi sur RMC Nicolas Vadot, caricaturiste pour le quotidien belge L'Echo. Elle ne me choque pas du tout parce que Coco (caricaturiste à Charlie Hebdo, ndlr) a toujours dit que ce qu'ils se fixaient comme règle, c'est le droit et cette Une ne contrevient pas au droit".
"Il ne faut pas oublier que le dessin de presse a un rôle cathartique très important, estime encore le caricaturiste. Il est là pour mettre la réalité à distance afin de la rendre plus supportable. C'est ce que fait Charlie Hebdo. Ce qui est le plus choquant ce sont les attentats, beaucoup plus que la Une de Riss". Pour Nicolas Vadot, "le gros problème de Charlie Hebdo c'est qu'il a beaucoup de lecteurs. C'est comme si, tout à coup, un journal porno était lu par plein de gens et que ces mêmes gens s'offusquent qu'il y ait des filles à poil dedans".
"C'est Charlie Hebdo..."
Pour autant, ce caricaturiste juge cette couverture "lourdingue": "Elle ne me fait pas rire mais est-ce que le dessin de presse est forcément là pour faire rire? Non, il est là pour interpeller." Et Nicolas Vadot de rappeler que "quand le roi Baudoin est mort, ils avaient titré 'Le roi des cons est mort'. Ce qui était extrêmement condescendant. Là au moins ils ont pris un symbole universel".
"Ce qui choque aussi ici c'est qu'ils ont pris Stromae, argumente encore le dessinateur. Je ne sais pas si Riss est au courant de l'origine de la chanson 'Papaoutai'. C'est que le père de Stromae est mort au cours du génocide rwandais donc l'analogie entre les deux est un peu lourdingue. Mais bon, c'est Charlie Hebdo... Ils sont comme ça".