Voeux de temps de crise et d'élections pour Sarkozy

Nicolas Sarkozy adressera samedi soir aux Français, pour la cinquième et dernière fois de son quinquennat, des voeux plus que jamais marqués par la crise économique mais aussi, cette fois, par la perspective de l'élection présidentielle de 2012. /Photo pr - -
par Emmanuel Jarry et Yann Le Guernigou
PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy adressera samedi soir aux Français, pour la cinquième et dernière fois de son quinquennat, des voeux plus que jamais marqués par la crise économique mais aussi, cette fois, par la perspective de l'élection présidentielle de 2012.
A moins de quatre mois de cette échéance, le chef de l'Etat, probable candidat à un second mandat, reste à la traîne dans les sondages derrière le socialiste François Hollande.
Le marathon des voeux lui offre une de ses dernières chances de reconquête de l'opinion publique, qui le juge sévèrement depuis fin 2007.
"A partir de janvier s'engage l'ultime bataille, celle des thèmes sur lesquels les Français se prononceront le 22 avril et 6 mai", souligne un responsable influent de son parti, l'UMP. "A ce titre, il faut être à l'initiative en permanence."
Le chef de l'Etat publiera-t-il ensuite un livre ou une "lettre aux Français", comme le président socialiste François Mitterrand le fit en 1988 avant de solliciter un second mandat ?
"C'est une idée parmi d'autres", dit le même responsable, selon lequel Nicolas Sarkozy pourrait ainsi défendre son bilan tout en demandant cinq ans supplémentaires pour achever les réformes que les crises à répétition de ces cinq dernières années, ferait-il valoir, l'ont empêché de mener à bien.
Selon une étude OpinionWay-Fiducial publiée par la Croix, les Français souhaitent avant tout des candidats des réponses au chômage, qui a atteint son plus haut niveau depuis 1999.
"Nous prendrons des initiatives fortes en matière économique et sociale, notamment sur l'emploi, mais aussi sur le plan diplomatique", dit-on à l'Elysée, sans autre précision.
DE LA "RUPTURE" À L'ANNÉE TERRIBLE
Le chef de l'Etat a promis des réponses à la question de l'emploi dès un sommet social programmé le 18 janvier.
Mais hors un recours accru au chômage partiel et à une flexibilité plus grande du travail, le sentiment, partagé jusque dans la majorité, est qu'il n'y aura pas de recette miracle sans retour d'une croissance plus que jamais incertaine.
Or, avec l'entrée en récession de la France, menacée de perdre le "triple A" qui lui permet d'emprunter à bon compte, et des prévisions internationales médiocres, 2012 s'annonce très sombre après l'année terrible qu'a été 2011 ().
Le 31 décembre 2007, lors de ses premiers voeux de président, Nicolas Sarkozy, qui se voulait le champion de la "rupture" avec la politique de ses prédécesseurs mais était déjà en chute libre dans les sondages après seulement huit mois de pouvoir, avait confessé "des erreurs".
Il avait promis une "deuxième étape" de son action et la mise en oeuvre d'une "politique de civilisation", formule dont nul ne peut vraiment dire aujourd'hui ce qu'elle recouvrait.
Le 31 décembre 2008, en pleine crise financière mondiale venue des Etats-Unis et à l'issue d'une présidence française de l'Union européenne en partie consacrée à tenter de l'endiguer, il avait invité les Français à "faire des efforts" mais assuré que la France sortirait "plus forte" de cette épreuve.
Le 31 décembre 2009, il avait souhaité que 2010 soit une "année de renouveau". Il s'était notamment engagé à "faire reculer le chômage et l'exclusion", à consolider le système de retraites - ce qui sera fait - et à mettre en oeuvre une "taxe carbone", qu'il devra, en revanche, renoncer à mettre en oeuvre.
QUEL MESSAGE ?
"Je ne suis pas un homme qui renonce à la première difficulté", avait pourtant alors souligné le chef de l'Etat, selon qui les efforts consentis allaient porter leurs fruits et le mot "fraternité" retrouver tout son sens en 2010.
Le 31 décembre 2010, il reconnaissait que la crise financière et économique internationale avait exacerbé le sentiment d'injustice ressenti par les salariés français.
Nicolas Sarkozy avait alors promis une année 2011 "utile" et "porteuse d'espérance", avec un retour de la croissance et, de nouveau, les premiers fruits des réformes engagées.
Mais ces voeux étaient à peine prononcés que la crise de la dette grecque déclenchait dans la zone euro une tourmente dont l'Europe ne s'est toujours pas sortie.
En novembre, la France comptait près de 2,9 millions de demandeurs d'emploi, sans compter ceux qui exercent une activité réduite. Et selon l'Institut national de la statistique, le taux de chômage pourrait dépasser 10% en juin prochain.
Nicolas Sarkozy n'a eu de cesse, pendant la campagne présidentielle de 2007 et tout au long de son quinquennat, de proclamer sa volonté de garder à la France ses usines.
Mais selon une étude de la société Trendeo, publiée mercredi par Les Echos, quelque 880 sites industriels ont été fermés en France et 100.000 emplois perdus dans ce secteur depuis 2009.
Signe de la montée de la pauvreté : les Restos du Coeur, créés en 1985 pour aider les plus démunis en leur distribuant des repas pendant la période hivernale, ont enregistré 5% à 8% de demandes supplémentaires depuis fin novembre.
L'Elysée a refusé jeudi de dire quel serait, cette fois, la tonalité du message présidentiel à des Français champions du monde du pessimisme, selon un sondage de BVA.
Edité par Yves Clarisse