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Ehpad: "Nous n'avions que 12 minutes pour faire une toilette, sinon ce n'était plus rentable", témoigne un ancien soignant

Les révélations sur des actes de maltraitances dans des Ehpad privés du groupe Orpea poussent certains à privilégier les établissements publics et à demander plus de prise en charge de la part de l'Etat.

L'Etat se saisit du scandale Orpea. Alors que la direction du groupe de maisons de retraite, accusé de maltraitances, a été auditionnée ce mardi par la ministre déléguée chargée de l'Autonomie Brigitte Bourguignon, deux enquêtes sont lancées ce même jour. "Nous lançons aujourd'hui une enquête Igas (Inspection générale des affaires sociales) et une enquête financière de l'IGF, c'est une première, parce qu'il faut taper fort", a assuré la ministre sur France Inter.

Désormais, le modèle d'Orpea pose question. Faut-il laisser le privé s'occuper de la santé des plus âgés ou au contraire renforcer la place de l'Etat dans le secteur? Pour le docteur Jérôme Marty, la deuxième option est la bonne. "Les politiques de droite ou de gauche qui dénoncent cette situation en sont co-responsables", assure-t-il ce mardi sur le plateau des "Grandes Gueules" sur RMC et RMC Story.

"Ils ont laissé les choses se développer en ne voulant pas sacraliser la filière gériatrique, en ne voulant pas en faire une voie d'excellence. Et en ne donnant pratiquement rien comme financement, ils ont laissé se développer des groupes financiers qui ont racheté de petits établissements dans une logique de profit pour les actionnaires. Aujourd'hui, ce sont des groupes financiers qui font uniquement une course au profit", ajoute le praticien.

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Les plats mélangés pour faire des économies

Est-ce la course au profit qui a réellement entraîné de tels dysfonctionnements? C'est ce que révèlent en tout cas plusieurs témoignages recueillis par RMC: "Nous n'avions que 12 minutes pour faire une toilette d'une personne âgée sinon après ce n'était plus rentable pour la direction", assure Richard, ancien aide-soignant.

"Je me suis vu donner des repas à trois personnes en même temps, des repas où l’on mélangeait vache qui rit, dessert et entrée en même temps pour gagner du temps. Il ne fallait pas non plus changer trop souvent les couches pour faire des économies", révèle-t-il.

Richard estime aujourd'hui que la santé des plus âgés doit relever du secteur public: "J’ai placé mon père atteint d’Alzheimer dans un Ehpad public à Salon-de-Provence, il y avait moins de moyens mais plus de personnel et il était mieux traité", assure-t-il.

Depuis la révélation du scandale, l'action Orpea a chuté en bourse. Dans la foulée, le directeur général du groupe, Yves Le Masne, a été démis de ses fonctions.

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Guillaume Dussourt