Taxe sur les géants du numérique: "Au-delà des apparences, c'est une taxe qui va être anecdotique"

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Coup d'envoi ce lundi après-midi des débats sur le projet de loi visant à taxer les géants du numérique. Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a vanté lundi à l'Assemblée le projet de loi comme étant à "l'honneur de la France", insistant sur le fait qu'aucun État n'était "ciblé" alors que Washington conteste la mesure.
Mais pour l'association altermondialiste Attac, les effets de cette taxe seront dérisoires:
"Sur le papier, c'est pas mal. C'est une première victoire parce que nous demandons depuis des années à ce que les géants du numérique soient taxés. Mais nous sommes en train de publier une note qui étudie en détail cette taxe et on voit qu'au-delà des apparences, c'est une taxe essentiellement symbolique qui va être assez anecdotique. Les deux tiers du chiffre d'affaires des GAFAM –Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft- ne vont pas être du tout concerné par cette taxe", a expliqué Raphaël Pradeau, porte-parole d’Attac France dans M comme Maïtena.
D'après les calculs d'Attac, 64% du chiffre d'affaires cumulé des Gafa échappera ainsi à la taxe: "Il va s'agir d'une taxe de 3% sur le chiffre d'affaire numérique c’est-à-dire un certain nombre d'activités, notamment la publicité en ligne. Donc ça marche bien pour Facebook ou Google, mais ça ne marche pas du tout pour Microsoft ou Apple", a détaillé Raphaël Pradeau.
Ce que dénonce Attac, ce sont les montages fiscaux permettant à ces multinationales de ne pas déclarer leur réel chiffre d'affaires. Dans son rapport, l'association estime en effet à 9,4 milliards d'euros le chiffre d'affaires réalisé grâce à des ventes en France qui ne sont pas déclarées dans l'Hexagone. En moyenne, ces entreprises dissimulent 74% de leur chiffre d'affaires, avec des écarts allant de 58% pour Amazon à 85% pour Google, selon le document.
"Elles pratiquent l'évasion fiscale et vont continuer à le faire"
"On veut montrer que cette taxe part d'un bon point de départ mais après, Bruno Le Maire parle de la taxe comme d'une mesure de justice fiscale. Mais ce n'est pas en taxant 3% d'une partie du chiffre d'affaires qu'on va mettre fin à ce scandale. Les GAFAM échappent à l'impôt parce qu'elles pratiquent massivement l'évasion fiscale et malheureusement elles vont continuer à le faire".
Raphaël Pradeau garde tout de même espoir: "Nous proposons une taxation unitaire c’est-à-dire, taxer une entreprise en fonction de ses bénéfices là où ils sont réalisés et malheureusement ce n'est pas du tout ce qui va se passer avec cette taxe. Mais ce n'est pas mort. En accentuant la pression citoyenne, et grâce au travail des journalistes et des lanceurs d'alerte, heureusement l'évasion fiscale arrive à l'agenda politique. Mais il va encore falloir accentuer la pression si on veut passer de belles déclarations à des politiques qui mettent vraiment fin à l'évasion fiscale".