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Apprendre l'anglais ou être expulsées: la menace de David Cameron aux musulmanes

Dans une tribune publiée lundi dans le Times, le Premier ministre britannique menace d'expulsion les musulmanes qui ne parlent pas suffisamment bien l'anglais. Une façon selon lui de lutter contre les ségrégations sexuelles, mais surtout de lutter contre la radicalisation islamiste. Tollé Outre-Manche.

Tout en voulant les protéger, il les menace. Le Premier ministre britannique David Cameron a annoncé lundi 18 janvier qu'il était prêt à faire expulser du Royaume-Uni les femmes musulmanes qui refusaient d'apprendre l'anglais. Le gouvernement a débloqué 25 millions d'euros pour permettre l'apprentissage de l'anglais aux étrangères musulmanes qui rejoignent leur époux au Royaume-Uni. Pour David Cameron, c'est une façon de lutter contre les ségrégations sexuelles. "Si vous n'améliorez pas votre maîtrise de la langue, cela pourrait nuire à votre capacité à rester au Royaume-Uni. Cela aidera ces hommes qui empêchent leurs partenaires de s'intégrer à comprendre qu'il y a des conséquences", s'est-il justifié dans une tribune publiée dans le Times.

"Plus réceptif aux messages extrémistes"

Mais le Premier ministre n'est pas que philanthrope, il y voit surtout une façon de lutter contre la radicalisation islamiste, estimant que la non-maîtrise de l'anglais pouvait rendre les musulmans britanniques plus vulnérables aux messages des groupes extrémistes. "Je ne dis évidemment pas qu'il y a un lien de causalité entre ne pas parler anglais et devenir un extrémiste. Mais si vous ne parlez pas anglais, si vous n'arrivez pas à vous intégrer, vous pouvez (…) être plus réceptif aux messages extrémistes", justifie David Cameron. Rappelant les devoirs qu'imposent selon lui l'arrivée dans un pays d'accueil, il écrit: "Nous ne devons plus jamais laisser notre « tolérance passive » nous empêcher de dire les vérités difficiles".

Une telle menace a évidemment fait réagir Outre-Manche, où vivent près de 3 millions de musulmans, sur une population de 53 millions d'habitants. Du côté de l'opposition travailliste évidemment, mais même du côté des conservateurs. Une ancienne présidente du parti a notamment regretté que l'accent soit mis uniquement sur les musulmanes et non pas sur tous les migrants, quel que soit leur sexe ou leur religion s'ils en ont une. La crainte, c'est que cela ne stigmatise cette catégorie de la population et apporte au contraire de l'eau au moulin des jihadistes, prompts à manipuler les opinions en leur faisant croire qu'il y a un complot occidentale contre la population musulmane. Quant aux organisations musulmanes britanniques, elles ont dénoncé une stigmatisation.

"On est vraiment dans la stigmatisation"

En France, M'hamed Henniche, président de l'Union des associations musulmanes de la Seine-Saint-Denis, ne dit pas autre chose. S'il reconnaît aisément que "maitriser la langue (du pays d'accueil) est le meilleur moyen de s'intégrer", il regrette que seule la communauté musulmane soit visée par cette menace. "On est vraiment dans la stigmatisation, et on rate le bienfait qui est d'inciter les gens à apprendre la langue étrangère", dénonce-t-il sur RMC.

P. G. avec S. Bruniet et T. Chupin