Bientôt des détenus remis en liberté faute d'avoir pu les escorter?
Va-t-on devoir libérer des détenus faute d'avoir pu les escorter au tribunal ? C'est la crainte du président de la cour d'appel de Rennes, qui s'en est alarmé dans un courrier adressé aux autorités de police et de gendarmerie en Bretagne et publié jeudi dernier par France Bleu. Car depuis lundi, les transferts de détenus doivent être assurés par les services pénitentiaires, et plus par la police ou la gendarmerie. Une situation ubuesque née d'un transfert de compétences entre le ministère de l'Intérieur et celui de la Justice acté en 2010 par le gouvernement de Nicolas Sarkozy.
"Les effectifs prévus ne sont toujours pas arrivés"
Si les surveillants sont donc désormais censés escorter les détenus, le matériel, la formation et les effectifs humains, eux, n'ont pas ou peu suivi. D'où cette sonnette d'alarme tirée par le président de la cour d'appel de Rennes qui souligne le risque de devoir reporter des procès, faute de pouvoir juger de visu les prévenus. Et s'ils restent trop longtemps en détention provisoire, certains seront tout simplement libérables.
Un scénario extrême bien sûr, mais qui est également évoqué par les syndicats de surveillants. Notamment Force Ouvrière pénitentiaire qui dénonce un transfert mal préparé. "Ce transfert de compétence a été prévu dès 2010, rappelle, dans Bourdin Direct, Joseph Rousseaux, délégué interrégional FO pénitentiaire pour la région Pays-de-la-Loire, Bretagne, Basse-Normandie. Malheureusement, les effectifs prévus pour cela ne sont toujours pas arrivés. L'ouverture a donc eu lieu hier dans des conditions un peu particulières".
"Cela fait bondir"
Concrètement, à Rennes, les véhicules spéciaux n'ont pas été livrés, les gilets par balle ne sont pas à la bonne taille, les repérages de trajets ne sont pas terminés... "Si on sait assurer la sécurité, aussi bien des détenus que de la population, on ne peut pas non plus nous lancer comme cela, sans équipements corrects, dans la nature", s'alarme encore Joseph Rousseaux.
"Si l'administration se veut rassurante en nous disant que le matériel manquant va bientôt arriver, on a toujours des doutes, s'inquiète pour sa part Emmanuel Guimaraes, délégué FO-Pénitentiaire. Et ces doutes sont fondés puisque des situations ont déjà eu lieu. Par exemple, quand on ne peut pas emmener un détenu devant un juge et que la loi va obliger la juridiction à le relâcher, cela fait forcément bondir".