Crise de la filière porcine: "Des drames familiaux sont en train de se jouer et personne ne dit rien"

- - AFP
Depuis septembre dernier et la manifestation des éleveurs à Paris, le prix du porc au kilo a chuté de 17% (à 1,06 euros le kilo) en dessous du coût de production des éleveurs et très loin du tarif négocié l'été dernier entre le gouvernement et les éleveurs (à 1,40 euros, ndlr). Conséquence inévitable de cette situation: les éleveurs de porcs sont au bord de la faillite. Ainsi, selon une récente étude de l'Insee, "entre 15 et 20% d'entre elles vont déposer le bilan dans les semaines à venir et 20% restent dans une situation de grande fragilité et ne passeront pas l’été".
Une situation de crise vécue par Nicolas, éleveur de porcs dans les Cotes d’Armor, qui ne s’est pas versé de salaire depuis quatre mois. Il s’endette donc tous les jours. "C'est intenable. On arrive à des taux d'endettement supérieurs à 100% donc plus rien ne nous appartient. On ne peut aussi plus vendre notre élevage puisqu'il n'a plus aucune valeur", déplore-t-il sur RMC. Et d'ajouter: "J'attends donc l'appel de mon banquier qui devrait bientôt arriver pour me dire d'arrêter. Je ne sais pas comment je ferais… Je vais sans doute devoir vendre ma maison et je devrais rembourser ma dette toute ma vie de salarié".
"La filière est en train de s'écrouler"
En ce moment, selon les syndicats d'agriculteurs, chaque semaine quatre éleveurs déposent le bilan dans les Cotes d’Armor. Ce qui inquiète fortement Nicolas: "Des drames familiaux sont en train de se jouer et personne ne dit rien, alarme-t-il. Noël arrive et des familles ne vont même pas pouvoir payer de cadeaux à leurs enfants. A un moment donné, il va falloir que les responsables prennent conscience de ça…"
"La filière est en train de s'écrouler comme un château de carte. C'est catastrophique, confirme Sébastien, éleveurs de porcs à Lamballe (Côtes d'Armor). Je ne peux pas me faire de revenus aujourd'hui et je le sens très mal pour l'avenir car je ne peux plus rien injecter dans mon entreprise pour la sauver. J'ai tout utilisé".
"Aujourd'hui, on n'a rien"
"Je n'arrive pas à m'imaginer dans les deux-trois mois…", se lamente-t-il encore. Et Nicolas de pointer du doigt les grandes distributions: "Je n'en vois pas déposer le bilan. Les seuls dans ce cas, ce sont les éleveurs. Et les suicides, ils ne se passent pas là-haut, ils se passent chez nous aussi".
Dès lors, si le prix du porc n’augmente pas avant Noël, la FDSEA promet de durcir ses actions, juste avant les fêtes de fin d’année. "Il faut absolument que d'ici la fin du mois de décembre, on trouve des solutions cohérentes car c'est toute une filière qui est en train de se casser la gueule", souligne Sébastien. Et de conclure, fataliste: "Aujourd'hui, on n'a rien. Notre filière n'est pas porteuse d'un projet, il n'y a rien. Strictement rien".