RMC

Départ de son fils pour mener le jihad en Syrie: "Il y a eu faute de la part de l'Etat"

La mère d'un Français parti rejoindre l'Etat islamique en Syrie poursuit en justice l'Etat français

La mère d'un Français parti rejoindre l'Etat islamique en Syrie poursuit en justice l'Etat français - ALBARAKA NEWS / AFP

La mère d'un mineur niçois parti faire le jihad en Syrie a engagé une action contre l’Etat français. Elle est ce mardi devant le tribunal administratif de Paris pour que la responsabilité de l'Etat soit reconnue après le départ de son fils en Syrie.

Grande première ce mardi au tribunal administratif de Paris. Pour la première fois, la justice va étudier la plainte d'une mère de famille qui attaque directement l'Etat français afin de faire reconnaître sa responsabilité dans le départ de son fils en Syrie. Nadine avait signalé le possible départ de son fils Bryan au commissariat, mais les policiers ne l'ont selon elle, "pas prise au sérieux". Bryan, 16 ans à l'époque et tout juste converti à l'islam, a quitté Nice le 27 décembre 2013 pour rejoindre avec deux amis du quartier Saint Roch, un groupe de Français installés en Syrie et rattachés à Al-Qaïda.

Il a pu quitter le territoire français vers la Turquie avec une simple carte d'identité, sans éveiller les soupçons de la police aux frontières à l'aéroport de Nice. Dès son départ, et alors qu'il était encore en France, sa mère a pourtant multiplié les courriers au ministère de l'Intérieur et à la Garde des Sceaux, mais elle n'a eu aucune réponse. Il y a un mois elle a décidé d'engager une action contre l'Etat. Plainte qui est donc étudiée ce mardi.

"C'est pour cela que je me bats"

"Je vais aller jusqu'au bout parce que je veux que l'Etat reconnaisse qu'il y a eu faute, témoigne Nadine sur RMC. Je pense que s'ils ne l'avaient pas laissé passer à l'aéroport de Nice, il serait encore là avec nous. C'est trop facile de dire que c'était à moi d'éduquer mes enfants. Moi, jusqu'à maintenant, j'ai toujours joué mon rôle de maman. J'ai toujours été derrière mon fils. C'est pour ça que je dis qu'il y a eu faute de la part de l'Etat et c'est pour cela que je me bats".

Dans une lettre adressée récemment à la mère, le ministère de l'Intérieur assure que ses services n'ont commis aucune faute en laissant partir Bryan. Il considère en effet que celui-ci ne faisait l'objet d'aucune mesure d'interdiction de sortie du territoire. Mais pour Samia Maktouf, l'avocate de Nadine, dans cette affaire l'Etat doit reconnaître ses manquements.

"Il faut agir, sortir du déni"

"L'agent de la police aux frontières aurait dû, par un travail de discernement, suspecté que Bryan ne pouvait pas franchir la frontière seul, sans bagage. D'autant plus qu'il n'avait pas de billet retour", fait-elle valoir. Elle ajoute: "C'est pourquoi ce procès est très important. Il a pour but de faire prendre conscience à tous les acteurs de la société qu'il faut agir, qu'il est important de sortir du déni".

Après le tribunal administratif, l'avocate envisage de saisir le procureur de la république mais aussi la Cour européenne des droits de l'homme. A noter que selon les derniers chiffres donnés par Bernard Cazeneuve: 80 mineurs sont actuellement en Syrie ou en Irak aux côtés de l'Etat Islamique mais aussi avec le Front al-Nosra (la branche d'Al-Qaïda).

Maxime Ricard avec Céline Martelet