De la “Taille” médiévale au fonds BPI: quand les Français financent la Défense

La Banque publique d’investissement (BPI) lance un fonds dédié à la défense et à la cybersécurité. Objectif: permettre aux Français d’investir directement dans les PME du secteur. Une initiative inédite, symbole d’un retour de l’investissement citoyen dans la souveraineté nationale.
Un placement patriotique dès 500 euros
Ce nouveau fonds sera accessible à partir de 500 euros d’investissement. Les sommes seront bloquées pendant cinq ans, et les rendements ne sont évidemment pas garantis. Mais pour la BPI comme pour le gouvernement, il s’agit de mobiliser l’épargne des Français au service de la défense nationale.
Autrement dit, investir dans ces entreprises, c’est aussi participer à l’effort de souveraineté, dans un contexte international tendu où la France veut renforcer ses capacités militaires et numériques.
La guerre, toujours financée par les Français
Historiquement, financer la défense du pays n’a rien de nouveau. Depuis le Moyen Âge, les Français ont toujours mis la main à la poche pour soutenir l’effort militaire. Tout commence au XVe siècle, pendant la Guerre de Cent Ans contre l’Angleterre. Ruinée mais décidée à se défendre, la France crée en 1439 un impôt permanent: la Taille, destiné à entretenir les troupes et à assurer la sécurité du royaume. C’est le premier impôt pérenne de l’histoire du pays.
Quand Louis XIV taxe les riches pour sauver le royaume
Plus de deux siècles plus tard, Louis XIV, à la fin de son règne, mène une guerre désastreuse contre l’Espagne. Le royaume est ruiné. Le roi décide alors de taxer les plus aisés, en créant un impôt exceptionnel: le “dixième”, prélevé sur tous les revenus, y compris ceux de la noblesse et de la famille royale. Une mesure de survie économique, bien avant les débats modernes sur la taxation des plus riches.
L’emprunt national, une tradition française
Autre levier historique: l’emprunt public. En 1871, après la défaite contre l’Allemagne, la France doit verser 5 milliards de francs-or d’indemnités. Le gouvernement lance alors une souscription nationale. Plus d’un million de Français participent, et la somme est remboursée dans les délais. L’idée refait surface pendant la Première Guerre mondiale, où les besoins financiers explosent.
L’impôt sur le revenu, né pendant la Grande Guerre
Entre 1914 et 1918, la guerre coûte près de 30 milliards de francs par an. Pour y faire face, la France invente de nouvelles ressources:
- création de l’impôt sur le revenu, initialement destiné à financer le conflit,
- incitation à vendre son or à l’État, pour renforcer les réserves,
- et emprunts massifs lancés auprès des particuliers.
À la fin de la guerre, le pays est exsangue… mais victorieux. De la Taille de 1439 à l’impôt sur le revenu de 1914, les Français ont toujours participé à l’effort de défense. Avec ce nouveau fonds d’investissement lancé par la BPI, c’est une version moderne de cette logique qui renaît: soutenir la sécurité nationale par l’épargne citoyenne.