"La RATP aurait du être poursuivie": 1 an avec sursis requis contre un conducteur de métro après la mort d'une femme à Paris

Quelques secondes ont suffi pour bouleverser deux familles. Le 19 avril 2023, une femme d’une quarantaine d’années est décédée, happée à la station de métro Bel-Air, dans le XIIᵉ arrondissement de Paris. Au moment de la fermeture des portes, son manteau s'était coincé et elle avait été emportée par le train de la ligne 6 qui repartait en direction de Nation.
Son mari et son fils étaient par ailleurs présent au moment du drame. Malgré l’intervention rapide des secours, la victime n’avait pas survécu. Le conducteur du métro, sous le choc, avait été pris en charge “par son encadrement et les pompiers”, avait indiqué la RATP qui “présentait ses condoléances à la famille”.
L’audience a eu lieu ce mardi 14 octobre 2025, soit deux ans et demi après le drame. Un an de prison avec sursis a été requis contre le conducteur de la rame de métro. Le délibéré est prévu le 18 novembre.
"Il ne pouvait pas anticiper la situation”
L’avocat du conducteur, Maître Jérôme Borzakian, a plaidé la relaxe. Selon lui, la responsabilité incombe avant tout à la victime et à la RATP: “La victime est la cause première de son accident. Une fois que mon client a actionné la fermeture des portes, elle a tenté de s’en extirper, mais son manteau s’est coincé. Le tissu était fin, et le système de sécurité de la RATP ne détecte pas les objets de moins d’1,5 cm. Mon client a reçu le signal pour repartir”, explique-t-il à RMC.
Maître Borzakian souligne que, cognitivement, le conducteur ne pouvait pas percevoir immédiatement que la dame était accrochée au train: “Il roulait entre 0 et 5 km/h. Au bout d’une seconde, sa visibilité était déjà réduite. Quand elle est tombée, il ne pouvait pas anticiper la situation.” Selon lui, la victime se trouvait “sur la ligne blanche, comme des millions d’usagers, à la dernière voiture à 70 mètres.”
“C’est la RATP qui aurait dû être poursuivie"
L’avocat dénonce également la responsabilité de la RATP: “C’est l’entreprise qui aurait dû être poursuivie. Les usagers ont mis trois secondes à arrêter le train à cause de poignées blanches au lieu de rouges.”
Les syndicats de conducteurs dénoncent, eux aussi, l’absence de la RATP au procès. Bastien Berthier, secrétaire FO métro/RER, estime qu’“un an, c’est toujours trop pour un collègue qui faisait simplement son métier. Malheureusement, notre collègue est aussi une victime. Deux familles sont détruites. La RATP aurait dû s’expliquer sur tous les dysfonctionnements de cette affaire. Les conducteurs de métro vivent dans la peur. Ce collègue avait 20 ans d’expérience, un dossier irréprochable, mais sa vie a basculé en une seconde.”
Sollicitée par RMC, la RATP a indiqué qu’une “enquête du BEATT est en cours à laquelle la RATP collabore pleinement et dont les conclusions devraient être connues d’ici la fin de l’année.”
La RATP a ouvert ses espaces à l’expert judiciaire pour les besoins de son investigation. Ni le juge d’instruction, ni le procureur à l’issue de l’expertise judiciaire n’ont appelé la RATP dans la cause.
La famille de la victime "n'en veut pas au conducteur"
Maître Jérôme Borzakian conclut sur l’impact personnel pour son client: "La vie de mon client est foutue. Il est chez un psychiatre depuis deux ans et demi. Il a fait 11 mois d'arrêt maladie. Il ne reconduira jamais un train et ce qu'il aimait dans sa vie, c'était de conduire des trains."
Du côté de la famille de la victime, le mari s’est montré conciliant: “Il n’en veut absolument pas au conducteur, mais à la RATP, qui n’a rien fait pour protéger les usagers”, a relaté l’avocat. Selon lui, la rencontre entre les deux familles s’est déroulée “dans les bras l’un de l’autre”.