Ils manifestent contre Starbucks, "une multinationale qui a payé zéro euro d'impôts en 2015"

- - AFP
Aurélie Trouvé est porte-parole d'ATTAC (Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne).
"Nous avons déposé devant une boutique Starbucks, près de l'Opéra, 1.000 litres de terreau pour symboliser le café en indiquant qu'on en avait assez de l'évasion fiscale.
On a mis en avant le fait que le déficit français, c'est à peu près ce que l'on perd en évasion fiscale en France, c’est-à-dire entre 60 et 80 milliards d'euros par an. Ce sont des chiffres classiquement avancés par les institutions publiques.
Le gouvernement veut faire une politique de rigueur en sabrant dans les dépenses publiques, en mettant à mal les services publics et les postes de fonctionnaires. Mais de l'argent, il y en a dans les paradis fiscaux et judiciaires et il faut une action du gouvernement si on veut récupérer cet argent. Allons chercher l'argent où il est, dans les paradis fiscaux et les circuits financiers. Et pas dans les services publics, ni dans les dépenses qui devraient servir à la transition écologique et sociale.
"Starbucks déclare un minimum de bénéfices en France"
On a ciblé Starbucks parce que c'est une des multinationales qui exerce fortement leur activité sur notre territoire et qui paie zéro euros d'impôts en 2015 grâce à de l'optimisation fiscale agressive. Starbucks France paie des redevances à une filiale aux Pays-Bas. Ils déclarent donc un minimum de bénéfices en France, 700.000 euros pour un chiffre d'affaire de 90 millions. Ils paient une redevance sur la marque, sur l'ameublement, sur les tasses de café à cette filiale aux Pays-Bas. Or, les Pays-Bas ont signé un accord avec Starbucks afin qu'ils paient très peu d'impôts. Cet accord est aujourd'hui considéré comme illégal par la Commission européenne.
Starbucks réalise son activité en France mais déclare ses bénéfices aux Pays-Bas grâce à un système d'évasion fiscale qui est aujourd'hui dénoncé par la Commission européenne qui leur réclame 30 millions d'euros pour "obtention d'aide illégale de la part du gouvernement des Pays-Bas". Le problème c'est que Starbucks a une armée d'avocats fiscalistes. Par ailleurs, les Pays-Bas se rangent du côté de Starbucks et ne réclament pas l'argent.
Le combat est difficile, heureusement on a une commission européenne qui est plutôt active sur le sujet. Le problème c'est que les gouvernements européens aujourd'hui ne suivent pas et on espère du gouvernement français qu'il soit réellement en pointe contre l'évasion fiscale, ce qui n'est pas le cas pour l'instant.
"On réclame une transparence totale pour les multinationales"
Il faut des mesures très claires, que l'on avance avec la plateforme française et européenne contre les paradis fiscaux. Par exemple, on réclame une transparence totale pour les multinationales, c’est-à-dire le fait qu'ils doivent déclarer toutes leurs filiales, leurs salariés, leurs bénéfices, leurs chiffres d'affaire dans chaque pays. Nous réclamons aussi la fin du dumping fiscal par le biais des accords entre pays européens et multinationales pour payer un minimum d'impôts.
Nous menons aussi des actions contre d'autres multinationales. Ces derniers mois nous avons déjà ciblé Apple, Zara, BNP Paribas, Société Générale, McDonald's. Nous allons continuer avec une coalition plus large d'organisation associatives syndicales citoyennes en s'attaquant dès la rentrée à Apple, qui est pour nous le symbole le plus représentatif de cette évasion fiscale. C'est une multinationale qui va extrêmement bien, mais elle vole l'argent aux citoyens.
La Commission européenne est beaucoup plus active que les gouvernements européens. Emmanuel Macron vient de repousser les négociations sur la taxe sur les transactions financières et on craint qu'il ait enterré l'idée. Donc nous avons beaucoup de crainte et c'est pour cela que nous voulons accentuer la pression".