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Immigration: la restauration peste contre les potentielles concessions à LR de Gérald Darmanin

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Pour séduire la droite, Gérald Darmanin s'est dit prêt à faire des concessions sur la régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers en tension… comme la restauration. Invité de l'émission Apolline Matin sur RMC, Alain Fontaine, président de l’association des Maîtres Restaurateurs, a déploré le choix de l'Intérieur.

Afin de proposer un projet de loi sur l'immigration qui sera voté, au contraire de la réforme des retraites (entre autres), Gérald Darmanin veut désormais durcir drastiquement les régularisations de situations administratives de personnes étrangères dans les métiers en tension.

Un changement de cap pour l'Intérieur, qui n'était initialement pas fermé à la question de la régularisation temporaire de travailleurs opérant dans des secteurs comme la restauration, en manque de personnel, et ne demandant qu'à obtenir une situation régulière.

Invité de l'émission Apolline Matin, Alain Fontaine, qui est notamment président de l'Association française de maîtres restaurateurs, a fait part de sa déception vis-à-vis de cette décision de la part du gouvernement.

"Cela fait partie des leviers de croissance dans nos restaurants. Certains établissements vont fermer car il leur manque des employés", rappelle Alain Fontaine.

"On a besoin de cette main d'œuvre"

Pour le chef du restaurant Le Mesturet, situé dans le IIe arrondissement de la capitale, la situation de pénurie d'employés dans le secteur de la restauration est par exemple injuste pour les apprentis, qui ont été formés alors qu'ils se dirigeaient vers une situation irrégulière sur le sol français dès l'obtention de leur majorité.

"On a besoin de cette main d'œuvre. Il faut savoir que nos jeunes que nous avons formés, qui sont en situation irrégulière aujourd'hui, sont arrivés à 15 ans dans le métier. Ils ont fait un apprentissage, et le fait de passer majeur implique qu'ils ne peuvent plus rester dans nos établissements", déplore Alain Fontaine, président de l'Association française de maîtres restaurateurs.

Alain Fontaine explique qu'il souhaite régulariser ces personnes, déjà intégrées depuis longtemps dans le marché du travail français, aussi parce que l'employeur "prend des risques, des risques d'emprisonnement et d'amendes clairement".

"Ils nous aident à nous relever"

De l'autre côté, le maître-restaurateur rappelle que les travailleurs en situation irrégulière, pour travailler et produire de la richesse, "prennent des risques d'un renvoi à la frontière, et on a besoin d'eux parce qu'on ne trouve personne d'autre". Il dénonce aussi le fait que "ces gens ne bénéficient pas de l'ascenseur social, et ne peuvent même pas progresser dans le métier.

Mécontent de ce virage à 180° opéré par le ministre de l'Intérieur, Alain Fontaine suppose donc une méconnaissance de la réalité des emplois fastidieux et de ceux qui les occupent.

"(...) J'aimerais bien que les détracteurs de cette loi prennent le métro avec moi à 6h le matin. Et à cette heure-là qui je vois? Des gens qui viennent d'autres pays que le mien", rappelle Alain Fontaine.

Alain Fontaine pointe d'ailleurs une incohérence profonde sur le traitement réservé aux travailleurs étrangers en France, assurant que "ça ne nous dérange pas que dans nos EHPAD, dans nos urgences, dans nos hôpitaux, ils nous aident à nous relever, et on est bien content qu'ils soient là", tandis que le gouvernement prend le chemin d'un blocage de l'arrivée de travailleurs étrangers dans le secteur de la restauration notamment.

La diminution, voire l'arrêt, de délivrance de ces titres de résidence provoquerait aussi un nombre toujours plus conséquent d'employés travaillant sous alias, une technique permettant à l'employé sans-papiers d'emprunter l'identité d'une autre personne. "Vous avez des gens qui rentrent chez nous et qui se mettent en "alias". Cela m'est arrivé une fois déjà d'avoir un alias dans mon établissement", a confirmé Alain Fontaine.

Alexis Lalemant