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"J'ai passé plus de temps ici qu'avec ma femme!": la colère des salariés d'Ascoval à Saint-Saulve

Les 281 salariés de cette aciérie, près de Valenciennes, ont cessé le travail mardi "écoeurés par l'Etat" et par le groupe Vallourec, qui refuse d'apporter le soutien financier demandé par le candidat à la reprise.

Depuis janvier, ils luttent. Mais à la veille de la décision de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg, l'espoir a quasiment disparu chez les 281 salariés de l'aciérie Ascoval à Saint-Saulve (Nord). 

Créée en 1975 par Vallourec, l'aciérie près de Valenciennes, experte en aciers spéciaux, a été placée en redressement judiciaire en janvier. L'entreprise, dont l'État est actionnaire, en avait cédé 60% au groupe Asco Industries, en conservant 40% avec des engagements de commandes. Mais Asco Industries a été placé en liquidation en février et depuis, l'aciérie attend un repreneur. 

Face à la menace de fermeture, une entreprise, Altifort, a fait une offre ferme de reprise, mais elle demande un soutien financier de la part de Vallourec, qui détient 40% de l'aciérie... qui refuse de mettre la main à la poche. Le groupe estime que le projet n'est pas viable, et surtout qu'elle n'a pas les moyens, qu'il chiffre à 51 millions d'euros.

"Le Maire assassine les entreprises par derrière"

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a rappelé à ses "responsabilités" le groupe Vallourec. "C'est un rigolo" estime Bruno Kopczynski, porte-parole de la coordination syndicale d'Ascoval.

"Monsieur Le Maire souffle le chaud et le froid depuis le début et on en a marre de monsieur Le Maire. Il n'avait qu'à venir devant nous. S'il faut qu'on casse, on va casser. L'Etat, Bruno Le Maire, qui prône la reconquête industriel, pendant qu'il vous l'annonce devant la caméra, il assassine les entreprises par derrière" accuse-t-il.

"Partir avec un coup de pied au cul!"

Autant d'éléments qui désespère les salariés, dont certains ont déjà passé toute une vie dans l'entreprise, comme Sandro, près d'un feu de palettes qui réchauffe les salariés, que RMC a rencontré:

"Ca fait 38 ans que je suis là! J'ai passé plus de temps dans la boîte qu'avec ma femme. Bruno Le Maire fait des annonces en disant que Vallourec doit prendre ses responsabilités, mais il ne veut rien savoir: il ne veut pas" explique-t-il résigné. 

Et de préciser: "A Ascoval, on est une famille. C'est toute la région qui a donné pour la boîte, c'est pas imaginable quand on a passé sa vie dans une boutique de partir avec un coup de pied au cul!"

"T'es comme nous, dans 6 mois, t'as perdu ton travail"

De son côté, c'est à bord de son petit engin de dépannage que Stéphane fait la visite du site à l'arrêt: plus aucun matériaux ne peut sortir avec le blocage de la ligne de chemin de fer. Quitte à se fâcher avec le vigile: "Reste tranquille, t'es comme nous, dans 6 mois, t'as perdu ton travail aussi". 

Dans l'entreprise depuis 10 ans, Stéphane ne cache pas son amertume de voir son entreprise en danger et son emploi menacé: "Il y a de la colère, de la haine. J'ai une famille, des enfants... J'aurai voulu que ça continue".

Si les salariés ne se font que très peu d’illusion de leurs propres aveux sur un potentiel reclassement dans une région déjà sinistrée, ce mercredi, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg s'est accordé un nouveau délai de deux semaines pour statuer sur le sort de l'aciérie. 

Thomas Chupin avec XA