Salarié malade en congés: "La mesure risque de provoquer des tensions", alerte Emmanuel Lechypre

C’est une décision très attendue qui vient d’être rendue par la Cour de cassation: les salariés français pourront désormais reporter leurs jours de congés s’ils tombent malades pendant leurs vacances. Une avancée qui aligne enfin le droit du travail français sur le droit européen.
Jusqu’ici, le code du travail français ne reconnaissait pas ce droit. Une situation jugée non conforme par Bruxelles: la Commission européenne avait lancé une procédure de mise en demeure contre la France. En Europe, la règle est claire : les jours de maladie ne peuvent pas être comptabilisés comme des jours de congés, car les congés sont faits pour se reposer, ce qui n’est pas possible lorsqu’on est malade. Concrètement, pour bénéficier du report, le salarié devra présenter un arrêt maladie couvrant la période concernée.
Ce que ça change pour les salariés
Pour les employés, la décision est une bonne nouvelle. Elle apporte plus de sécurité: les congés annuels sont garantis, même en cas de problème de santé. Elle apporte aussi plus d’équité: un salarié malade ne sera plus pénalisé par rapport à un collègue en bonne santé.
Il existe cependant quelques limites. En vacances à l’étranger, il peut être compliqué d’obtenir rapidement un arrêt de travail. Autre point: financièrement, le salarié peut y perdre. Les congés payés sont indemnisés à 100% du salaire, contrairement aux arrêts maladie, souvent réduits par les jours de carence (entre 1 et 3 jours).
Un casse-tête pour les entreprises
Côté employeurs, la mesure risque de provoquer des tensions. Les congés reportés devront être reprogrammés, ce qui peut désorganiser les plannings, en particulier dans les petites structures. Surtout, la décision aura un impact financier.
Jusqu’à présent, lorsqu’un salarié tombait malade en vacances, les jours étaient perdus pour lui, mais "économisés" pour l’entreprise. Désormais, ils devront être rémunérés comme de véritables congés, mais à une date ultérieure.
Exemple: pour un salarié payé 3.000 euros brut par mois, dix jours de vacances annulés par un arrêt maladie coûteront environ 2.000 euros à l’entreprise, contre zéro auparavant. Enfin, en cas de rupture du contrat de travail, ces jours reportés viendront gonfler l’indemnité de congés payés dus au salarié.
Avec cet arrêt, la France rejoint ses voisins européens en garantissant le droit au repos des salariés, même lorsqu’un problème de santé survient. Une avancée sociale saluée par les syndicats, mais qui s’annonce coûteuse et complexe à gérer pour les entreprises.