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Expérimentation de la circulation inter-files: "Ça va sécuriser la pratique"

La circulation inter-files est déjà largement pratiquée, comme ici sur le périphérique parisien.

La circulation inter-files est déjà largement pratiquée, comme ici sur le périphérique parisien. - Thomas Samson - AFP

Depuis ce lundi, la circulation inter-files des deux-roues motorisés est autorisée à titre expérimentale dans plusieurs départements, et notamment en Ile-de-France. Bien qu'interdite ou juste tolérée jusqu'à maintenant, la pratique est largement répandue. Automobilistes et motards se réjouissent de cette expérimentation.

Fini l'illégalité pour les motards et conducteurs de deux-roues motorisés. Et surtout, fini l'hypocrisie. Le gouvernement lance ce lundi 1er février une expérimentation (en Ile-de-France, Bouches-du-Rhône, Gironde et Rhône) de la circulation des deux-roues motorisés entre les files de voitures, une pratique largement répandue chez les motards et conducteurs de scooters (97,5% des utilisateurs de deux-roues se livraient à la circulation inter-files en 2012, date d'un sondage réalisé par 2-roues Lab'). Depuis de nombreuses années, les associations d'usagers des deux-roues souhaitent voir cette pratique autorisée et, fin 2013, le Conseil de la sécurité routière (CNSR) avait recommandé une expérimentation pour donner à tous les usagers un cadre clair. On y est.

"Ça va permettre d'avoir un comportement responsable"

"Il faut être honnête, l'expérimentation, elle a lieu depuis 40 ans, glisse Pierre Chasseray, président de l'association 40 millions d'automobilistes. On avait quand même quelques malheureux motards qui se faisaient sanctionner parce que la pratique était illégale. Et à partir du moment où on règlemente, on sécurise la pratique. Ça permet de mieux l'enseigner dans le cadre de la formation au permis de conduire. Et ça va permettre d'avoir un comportement responsable, je l'espère, tant du côté des automobilistes que des motards".

Car en mettant fin à l'illégalité de la circulation inter-files, le gouvernement souhaite encadrer la pratique. Les motards devront ainsi respecter certaines règles : la remontée des files ne sera autorisée que lorsque la circulation est dense et les motards ne pourront rouler qu'entre les deux voies les plus à gauche. Leur vitesse sera également limitée à 50km/h. Par ailleurs, la pratique sera désormais enseignée dans les auto et moto-écoles.

"Les gens prendront plus conscience des motards"

Une bonne chose pour Jean-Benoît, qui conduit sa moto tous les jours sur le périphérique parisien. La remontée entre les files aux heures de pointe, il connaît bien cette pratique, et ses dangers... "Il faut beaucoup plus se projeter, il faut faire attention aux voitures qui n'indiquent pas les changements de sens". Il dénonce "les automobilistes qui tiennent le volant d'une main et le portable de l'autre, et qui dévient sans s'en rendre compte. C'est ça qui créé finalement le plus d'accidents". C'est pourquoi il se réjouit de la légalisation de la circulation inter-files. "Ça permet de dire aux automobilistes : 'attention vous savez maintenant que c'est réglementaire de remonter le fil'. Je pense que les gens prendront plus conscience des motards qui remontent la file et feront plus attention".

"On aurait pu se passer de 4 ans d'expérimentation"

Mais pour les automobilistes chevronnés comme Patrice, l'autorisation du remonte-file ne bouleversera pas les comportements sur la route. "Je ne vois pas ce que ça va changer, c'est une pratique courante depuis longtemps. Il y a sans doute des automobilistes que ça énervent, donc ils vont devoir apprendre à moins s'énerver, parce que maintenant c'est officiel et autorisé. Mais dans l'ensemble je trouve que ça se passe bien".

"Ça se passe bien". C'est l'argument que met en avant Nathanaël Gagnière, de la Fédération française des motards en colère. Selon lui, la pratique est tellement répandue qu'elle s'imposera sans difficulté. "L'expérimentation de la circulation inter-file n'est qu'un processus administratif. Nous, ça fait longtemps qu'on demandait une généralisation qui était la phase la plus logique et rapide. On aurait pu se passer de quatre ans d'une phase d'expérimentation". Mais le ministère de l'Intérieur veut prendre son temps. Un bilan de cette expérimentation sera établi tous les ans, et la généralisation n'interviendra pas avant 2020.

Philippe Gril avec Benjamin Smadja et AFP