Familles défavorisées: vers une allocation pour acheter des fruits et légumes?

- - Philippe Huguen - AFP
Après l'allocation logement et l'allocation chômage, voici l'allocation… fruits et légumes. Le ministère de la Santé expérimente cette aide financière aux familles défavorisées pour les inciter à manger plus sainement. Ce projet Flam (fruits et légumes à la maison) concerne pour l'instant une centaine de familles de Saint-Denis, en banlieue parisienne (Seine-St-Denis). Sélectionnées par les services sociaux de la ville sur critères de ressources, ces familles comptant au moins un enfant entre trois et dix ans reçoivent des bons d'achats de 16 à 24 euros tous les mois. Des bons utilisables au marché de Saint-Denis ou dans des supermarchés de la ville pour acheter des fruits et légumes frais, des conserves ou des surgelés ou même des compotes. En plus de cette "allocation", le projet propose des ateliers de cuisine pour apprendre à cuisiner sain.
"Tout ce qui va dans ce sens doit être encouragé"
Un enjeu de santé publique pour Camille de Brauer-Buscail, la médecin chargée de piloter cette opération, qui rappelle dans Le Parisien que "les fruits et légumes, dont la consommation réduit le risque de maladies, coûtent cher". L'expérimentation doit durer une année, à l'issue de laquelle un bilan sera fait. S'il est concluant, l'allocation sera pérennisée et généralisée, promet le ministère de la Santé.
"C'est une initiative très heureuse et il faut encourager ce type de démarche qui mérite une extension. Tout ce qui va dans ce sens doit être encouragé", s'enthousiasme Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière à Paris, ce mercredi sur RMC.
"Un engrenage dont on ne pourra pas sortir"
Un avis que ne partage pas son confrère Jean-Marie Bourre, nutritionniste membre de l'académie nationale de médecine, interrogé par RMC.fr. Le médecin se dit "dubitatif" quant à l'efficacité d'une telle mesure qui ne peut, selon lui, être que ponctuelle.
"Avec ce genre de subvention, on risque de mettre le doigt dans un engrenage et on ne saura pas en sortir. Pourquoi ne pas aller dans ce cas vers la gratuité de certains aliments ? Pourquoi ne pas rendre gratuite la baguette de pain ? Et pourquoi ne pas étendre cette allocation aux retraités plutôt que de la réserver aux familles défavorisées, qui ne sont d'ailleurs pas forcément celles qui mangent le moins de fruits et légumes?".
Le Dr Jean-Marie Bourre, qui vient de publier La chrono-alimentation du cerveau (Odile Jacob), applaudit par contre les cours de cuisine qui sont proposés dans le cadre du projet Flam aux familles défavorisées. Plutôt que cette allocation fruits et légumes, le médecin plaide pour des cours de nutrition à l'école dès le plus jeune âge. Une mesure bien plus efficace selon lui pour changer les comportements.