Imposer aux cantines de se fournir localement : "Au moins on connaît le fournisseur"
Manger local dans les cantines pour aider les éleveurs en difficulté. L'Assemblée Nationale examine ce jeudi une proposition de loi qui prévoit l’introduction dans la restauration collective publique, dès 2020, de 40 % de "produits locaux, de saison et issu de l'alimentation durable". C'est l'une des réponses à la crise de l'élevage qui avait paralysé une partie du pays l'été dernier. C'est François Hollande lui-même qui avait réclamé que les cantines fassent la part belle aux produits issus de l'agriculture française. Jusqu'ici, seulement un tiers des produits consommés dans les cantines sont d'origine France.
Pour expliquer ce faible pourcentage, la députée EELV Brigitte Allain, explique sur RMC que les collectivités locales "sont inquiètes à cause du code des marchés publics. Elles ont peur d'être sanctionnées (si elles privilégient un fournisseur par rapport à un autre, NDR) et elles n'osent pas s'engager". "La loi que je propose va les conforter", assure l'écologiste.
"90% d'achats français et 40% de produits mayennais"
S'il y a bien un territoire qui n'a pas ces craintes, c'est la Mayenne, département rural précurseur : l'été dernier, en pleine crise des éleveurs, le Conseil départemental expliquait vouloir faire des menus 100% français dans ses collèges, et si possible 50% local. "Aujourd'hui on est à près de 90% d'achats français et à un peu moins de 40% de produits mayennais", se félicite Olivier Richefou, président UDI du département de la Mayenne.
Une initiative qui réjouit tout le monde comme l'a constaté RMC, dans un collège de Laval. Le cuisiner déjà, ravit de refaire ce qu'il aime, et non plus seulement "ouvrir des sachets". Lorsque nous l'interrogeons, il vient de réceptionner du "rosbif à rôtir". "Ça vient d'un agriculteur de Montigné-le-Brillant", à quelques kilomètres de là". "C'est un beau muscle. Là on va se faire plaisir à travailler cette matière-là", sourit Eugène Brault. Si ce n'est pas simple de ne cuisiner que du local, il fait tout de même l'effort dans ses commandes. "C'est une adaptation. On demande aux fournisseurs de prévoir telle ou telle quantité pour dans six semaines". Mais au moins, avec la proximité, "on connaît le fournisseur. On sait qu'il n'y aura pas de tromperie sur l'animal. Et nous faisons du meilleur travail".
"Un plus" pour les éleveurs
Dans la cantine, les collégiens semblent apprécier. "C'est bien parce que c'est du Mayennais. Les produits locaux, c'est meilleur que les produits qui viennent de partout (sic)", estime ainsi Anaïs, élève de troisième.
Des élèves contents de ce qu'ils ont dans leur assiette et un éleveur qui voit ça d'un bon œil, forcément. Grâce à une seule de ses bêtes, Didier Plancho a pu ravitailler huit collèges du département. "C'est un plus pour nous, reconnaît-il. Parce qu'avec la crise, il faut prendre tous les petits créneaux, on n'a pas le choix. Tout est bon à prendre". Il voit d'un bon œil la proposition de loi de la députée Brigitte Allain. "Il faut que les gens soient sensibilisés pour acheter du local au maximum".
"Pas de couts supplémentaires"
Tout cela est bien vertueux, mais à un cout, forcément. Mais pas si élevé, assure Denis Lemetayer, chargé de la restauration au Conseil Départemental. "Nous avons fixé un prix en interne qui permet au producteur d'avoir un revenu décent, sans pour autant grever le budget alimentaire des collèges. On essaie de gommer les contraintes de coût en rectifiant les quantités servies aux élèves : pas la peine de leur servir 120 grammes quand ils en mangent 80. Ça nous permet aussi de lutter contre le gaspillage". Grâce à ce système, viande locale ou pas, le prix du repas n'a pas évolué et est resté en Mayenne à quatre euros par enfant. Vertueux, on vous dit.
Brigitte Allain n'a d'ailleurs pas de crainte pour sa proposition de loi, qui devrait être adoptée par les parlementaires. D'autant que les Français y sont largement favorables. Dans un sondage Ifop publié lundi, 76 % des sondés se disaient favorables à l'introduction d'aliments issus de l'agriculture locale dans la restauration collective publique.