"Aucun scrupule humanitaire": le portrait inquiétant de Poutine par un ancien de la DGSE
Dans une allocution télévisée diffusée jeudi, Vladimir Poutine a répété que le but de la guerre engagée en Ukraine le 24 février n’était pas d'"occuper" le pays. Selon lui, l’Ukraine s’apprêtait, avec le soutien des Etats-Unis et "d’autres pays occidentaux", à déclencher "un bain de sang et une épuration ethnique", "une offensive massive sur le Donbass et ensuite sur la Crimée était seulement une question de temps".
"Il s'enferme dans une forme d'autisme"
"Même pour son collaborateur, sa tête reste une boîte noire. On ne sait pas vraiment ce qui s'y passe, mais quelque chose ne tourne pas rond", analyse Bernard Bajolet, ancien directeur général de la sécurité extérieure (DGSE).
"Quand on le voit dans l’immense salle du Kremlin, avec ses collaborateurs à 15 ou 20 mètres de lui, on ne peut pas l’expliquer seulement par le Covid. Il y a un phénomène d’isolement croissant. Il s'enferme dans une forme d'autisme, n’écoute que ses propres arguments. Aucun de ses collaborateurs n’ose le contredire. Dans la Russie soviétique, il y avait une sorte de collégialité. là, cela n’existe plus", a continué celui qui a aussi été ambassadeur de France en Bosnie-Herzégovine, en Irak et en Afghanistan.
"Il n'a aucun scrupule humanitaire"
“Poutine est capable d’écraser des villes entières, comme on l’a vu à Grozny, Alep et comme on est en train de le voir à Marioupol. Il n'a aucun scrupule humanitaire", a également estimé Bernard Bajolet, vendredi matin sur RMC. Le ministère de la Défense russe a d’ailleurs annoncé vendredi que l’armée russe combattait désormais dans le centre-ville de Marioupol.
"A Marioupol, les unités de la République populaire (autoproclamée, ndlr) de Donetsk, avec le soutien des forces armées russes, resserrent leur étau d'encerclement et combattent les nationalistes dans le centre de la ville", a indiqué le porte-parole du ministère. La veille, 30.000 civils avaient été évacués de la ville par les autorités ukrainiennes.
"Poutine a sous-évalué la résistance ukrainienne"
Dans son discours de jeudi, Vladimir Poutine a déclaré que "l’opération spéciale" en Ukraine se déroulait "avec succès, strictement selon les plans établis à l’avance". "Le Blitzkrieg est un échec. Poutine a sous-évalué la résistance ukrainienne. Ses services n’ont pas su ou pas osé analyser la réaction du peuple ukrainien", estime de son côté Bernard Bajolet, ajoutant que "cette immense armée n’était pas prête".
"Il ira jusqu'au bout"
Une issue est-elle possible dans ce conflit? "Vladimir Poutine ira jusqu'au bout. On peut craindre que les dialogues ne soient qu’un écran de fumée. Pour l’instant, il estime ne pas avoir suffisamment de gages sur le terrain pour arrêter cette guerre. Il n’a pas perdu, mais iI a beaucoup perdu. L’armée russe ne s’est pas couvert de gloire mais plutôt de honte", a conclu le diplomate.