Mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahu: un tournant dans la guerre ou seulement un symbole?

La Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt à l'encontre de Benjamin Netanyahu et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, qui auraient été commis dans la bande de Gaza. Un mandat a également été émis contre le chef de la branche armée du Hamas Mohammed Deif, également pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
La CPI agit au nom de 124 pays signataires du Statut de Rome. Au nom de ces pays, elle se saisit pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité, génocide et atteintes à l'administration de la justice. Les mandats d'arrêt ont été classés "secrets" pour protéger les témoins et offrir une garantie quant à la suite des enquêtes, explique la CPI, qui considère toutefois qu'il est dans l'intérêt des victimes et de leurs familles qu'elles soient informées de l'existence des mandats.
L'Italie et l'Espagne s'engagent à l'arrêter, la France "prend acte"
Qu'est-ce que cela peut changer concrètement dans le futur? Pas grand-chose, c’est surtout symbolique, mais on ne peut pas dire que ça ne change rien. Vladimir Poutine est visé par un mandat lui aussi. On ne peut pas dire que cela a vraiment pesé dans la guerre en Ukraine. Disons que cela a contribué à l’isoler. Mais à l’exception de Poutine, c’est la première fois qu’un mandat du genre vise une grande puissance du côté occidental. Depuis sa création en 2002, la CPI a engagé 32 procédures. Près de la moitié sont toujours en cours et bien souvent, les suspects sont toujours en liberté.
Le procureur de la CPI a appelé les États parties à "se conformer" aux mandats d’arrêt. Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a rappelé que les mandats émis par la CPI doivent être "respectés et appliqués". Il ne s’agit pas d’une décision "politique", dit-on, mais d’une décision "juridique".
L’Italie a rapidement répondu positivement au tribunal de La Haye. Le ministre italien de la Défense a déclaré que l'Italie serait obligée d'arrêter le Premier ministre israélien en cas de visite dans le pays. Au sein de l’Union européenne, l’Espagne s’est engagée, comme l’Italie. L’Autriche s'est dit cependant surprise de voir les dirigeants israéliens et un membre du Hamas sur le même plan, tandis que la Hongrie a parlé de "honte".
La France a annoncé, vendredi matin, par le biais du ministère des Affaires étrangères, "prendre acte" des mandats d'arrêts.
Les États-Unis et Israël ne reconnaissent pas la CPI
L’annonce a suscité de très nombreuses réactions. Pour l’Etat hébreu, la CPI a perdu "toute légitimité", avec des "ordonnances absurdes". Yoav Gallant parle d’un "dangereux précédent". Benjamin Netanyahou a lui qualifié les magistrats "d’antisémites" et a comparé ces mandats d’arrêt à un nouveau "procès Dreyfus". Le ministre d’extrême droite de la sécurité nationale, Itmar Ben Gvir, a de son côté appelé à réagir en annexant toute la Cisjordanie et en étendant la colonisation.
En réalité, la Cour pénale internationale a sans doute renforcé Netanyahou en interne, puisque même l’opposition s’indigne aujourd’hui et parle de "récompense au terrorisme". Aux Etats-Unis, Joe Biden a dénoncé une annonce "scandaleuse". Le camp trumpiste a promis de prendre des mesures contre la CPI, et le futur conseiller à la Sécurité nationale a évoqué un "biais antisémite " de la Cour. Précisons toutefois que ni les Etats-Unis ni Israël ne reconnaissent le tribunal de La Haye.