Tensions diplomatiques entre Paris et Rome: "Côté français, il y a une dramatisation volontaire de la crise politique"
Du jamais-vu depuis 1945. La France a rappelé ce jeudi son ambassadeur en Italie après une série de déclarations "outrancières" de responsables italiens, une rare escalade entre deux pays de l'UE qui cristallise un peu plus les lignes de fracture en Europe à quelques mois des élections européennes.
Les deux responsables en question, le ministre de l'Intérieur Matteo Salvini et le vice-Premier ministre Luigi Di Maio, figures de proue du gouvernement populiste italien, se sont aussitôt dit prêts à rencontrer le président Emmanuel Macron et le gouvernement français.
Ce rappel de l'ambassadeur français à Rome est le dernier épisode des relations qui se crispent depuis plusieurs mois entre la France et l'Italie. En juin dernier, quand l'Italie refuse d'accueillir l'Aquarius qui transporte des migrants sauvés en Méditerranée, Emmanuel Macron parle de "lèpre qui monte", de "nationalisme qui renait". Matteo Salvini de son côté, dénonce l'arrogance du président français. Le décor est planté.
Une manoeuvre politique française?
Puis en janvier, le vice Premier ministre Luigi Di Maio accuse la France d'appauvrir l'Afrique et de pousser les migrants à rejoindre l'Europe. Les échanges se poursuivent avec Salvini qui espère le départ rapide du "très mauvais Président français" et Emmanuel Macron qui souhaite au peuple italien "des dirigeants à la hauteur de son histoire".
Enfin, on apprend que le vice Premier ministre Luigi Di Maio a rencontré mardi en banlieue parisienne des représentants des gilets jaunes. Cette fois, c'en est trop: l'ambassadeur en poste à Rome est rappelé à Paris. Une démarche inédite que le Quai d'Orsay justifie par des ingérences et des attaques sans précédent depuis la Seconde guerre mondiale.
Pour l'historien Marc Lazar, il s'agit d'une manœuvre politique: "Du côté français, il y a une dramatisation volontaire de la situation de la crise politique franco-italienne qui est la plus grave depuis 1945. Il y a aussi un petit jeu politique en dehors de la perspective des élections européennes, c'est la volonté de jouer sur les contradictions internes du gouvernement italien. C'est Luigi Di Maio qui est venu seul en France avec les 'gilets jaunes', mais tous les ministres italiens ne sont pas d'accord là-dessus".