Tirs israéliens lors d'une distribution d'aide, plus de 110 morts: ce que l'on sait du drame à Gaza

Le corps d'un Palestinien tué lors d'un incident tôt le matin alors que les habitants se précipitaient vers des camions d'aide dans la ville de Gaza, le 29 février 2024. - AFP
Au moins 112 Palestiniens ont été tués jeudi lorsqu'une foule s'est ruée sur un convoi d'aide alimentaire dans la ville de Gaza où la situation humanitaire est désespérée selon l'ONU, un drame aux versions contradictoires.
Le Hamas affirme que l'armée israélienne a ouvert le feu sur la foule. Israël reconnait des "tirs limités" des soldats qui se sentaient "menacés", assurant que la majorité des personnes tuées l'ont été dans une bousculade. Voici ce que l'on sait jusqu'à présent:
Tirs de l'armée israélienne?
Un témoin a déclaré à l'AFP que les violences ont éclaté alors que des milliers de personnes désespérées en quête de nourriture s'agglutinaient près du "rond-point de Naplouse", dans l'ouest de Gaza-Ville.
"Des camions remplis d'aide se sont approchés trop près de certains chars de l'armée qui se trouvaient dans la zone et la foule, des milliers de personnes, a pris d'assaut les camions", a déclaré le témoin, refusant d'être nommé pour des raisons de sécurité.
"Les soldats ont tiré sur la foule car les gens s'approchaient trop près des chars".
Des images aériennes publiées par l'armée israélienne montrent ce qu'elle dit être des dizaines de Gazaouis encerclant les camions d'aide. Selon le ministère de la Santé du Hamas, 112 personnes ont été tuées par balle et 760 ont été blessées.
Hossam Abu Safiya, directeur de l'hôpital Kamal Adwan de Gaza-Ville, a déclaré que toutes les victimes avaient été touchées par "des balles et des éclats d'obus provenant des forces d'occupation".
Un responsable militaire israélien a évoqué une première bousculade, impliquant "des milliers de personnes" au cours de laquelle "des dizaines de Gazaouis ont été blessés et tués, certains d'entre eux écrasés par les camions" qui roulaient. Une partie du convoi a continué sa route, poursuivi par "des dizaines de civils" qui se sont approchés des chars et des forces israéliennes, selon le responsable.
"Les soldats ont tiré des coups de semonce en l'air, puis ont tiré sur ceux qui représentaient une menace", a-t-il ajouté, soulignant qu'ils avait eu "une réponse limitée, des tirs limités".
En soirée, le porte-parole de l'armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari, a affirmé que les soldats n'avaient mené "ni tirs de tanks, ni frappes aériennes en direction du convoi".
Déjà des pillages?
Le 20 février, le Programme alimentaire mondial a annoncé qu'en dépit de la faim généralisée, il suspendait à nouveau les livraisons d'aide au nord de Gaza après l'attaque et le pillage de convois par des civils désespérés. Ces deux convois étaient les premiers depuis plus de trois semaines.
Le 18 février, un convoi a dû repousser "de multiples tentatives de personnes tentant de monter à bord de nos camions, puis de faire face à des tirs une fois entrés dans la ville de Gaza", a indiqué l'agence onusienne.
Le lendemain, "plusieurs camions ont été pillés (...) et un chauffeur de camion a été battu. Le reste de la farine a été spontanément distribué à partir des camions dans la ville de Gaza, au milieu d'une forte tension et d'une colère explosive", a-t-il ajouté.
Une situation désespérée?
Depuis des mois, les travailleurs humanitaires mettent en garde contre une situation de plus en plus désespérée pour les civils de Gaza, et lundi, un responsable du bureau humanitaire de l'ONU, OCHA, a déclaré qu'une famine généralisée était "presque inévitable".
Les estimations de l'ONU montrent que 2,2 millions de personnes - la grande majorité de la population de la bande de Gaza - sont menacées de famine, en particulier dans les zones nord autour de la ville de Gaza.
Selon l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, l'Unrwa, un peu plus de 2.300 camions humanitaires sont entrés dans la bande de Gaza en février, soit une baisse d'environ 50% par rapport à janvier.
Cela représente une moyenne bien inférieure à 100 camions par jour, contre environ 500 qui arrivaient quotidiennement avant la guerre.
Qui a organisé le convoi?
Le porte-parole de l'armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari, a indiqué que le convoi de 38 camions entré à Gaza depuis le terminal de Rafah, à la frontière égyptienne, était affrété par des "entreprises privées", sans autre précision.
Le chef de l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini, a souligné sur X (ex-Twitter) que "ni l'Unrwa ni aucune autre agence de l'ONU ont été impliquées dans cette distribution".
"La vie quitte Gaza à une vitesse terrifiante", s'est indigné le chef des Affaires humanitaires de l'ONU, Martin Griffiths, près de cinq mois après le début de la guerre entre Israël et le Hamas déclenchée par une attaque sanglante sans précédent sur le sol israélien du mouvement islamiste palestinien.