Turquie: comment le séisme meurtrier a rabattu les cartes avant la présidentielle

62 millions d’électeurs turcs sont appelés ce dimanche aux urnes. Ils vont devoir décider si le président turc Recep Tayyip Erdogan peut continuer à diriger le pays après 20 ans au pouvoir. Le scrutin s’annonce serré entre le président sortant et Kemal Kiliçdaroglu qui mène une opposition unie.
Mais dans le Sud du pays, dans la région d’Antakya, durement frappé par le séisme du 6 février 2023, les habitants sont particulièrement remontés contre le pouvoir en place. Trois mois après le tremblement de terre qui a fait 50.000 victimes selon un bilan officiel, la ville qui comptait plus de 200.000 habitants avant le drame est quasiment entièrement détruite. Et la reconstruction s’annonce très lente malgré les promesses du gouvernement.
De la maison de Cem, il ne reste que quelques murs éventrés. “Nous n’avons reçu aucune aide du gouvernement. Je suis en colère. On se sent abandonné”, indique-t-il.
Au cours du tremblement de terre, Cem a perdu sa petite amie et l’un de ses cousins. Cet ancien professeur de sport en veut au pouvoir en place. Dimanche, il votera contre le président Erdogan.
“Je suis vraiment décidé à voter pour l’opposition. Il faut du changement. Depuis cette catastrophe, je m’intéresse vraiment à la politique. Pense qu’il faut quelqu’un de nouveau à la tête du pays”, juge-t-il.
Des promesses de reconstruction intenables?
Dans la vieille-ville, au milieu des gravats toujours pas déblayés, un hôtel en ruine. Son propriétaire ne pense pas que l’opposition au président turc ferait mieux. “Ce n’est pas une question de politique, peu importe si c’est A, B, ou C au pouvoir. En ce moment, avec les élections, beaucoup de partis nous ont oubliés. Il faut absolument qu’ils s’intéressent de nouveau aux habitants des zones détruites”, plaide-t-il.
Une accusation que rejette Dogan Yagar. Ce représentant du principal parti d’opposition est persuadé que le tremblement de terre fera basculer l’élection.
“Beaucoup de gens nous rejoignent. Des gens qui soutenaient le gouvernement avant le tremblement de terre souffrent aussi. Ils ont perdu leur maison, leur emploi et ils se rendent bien compte que les dirigeants actuels ne font rien pour eux”, explique-t-il.
Selon l’ONU, ce sont plus de 600.000 bâtiments qui ont été endommagés. Il y a près d’un million d’habitants à reloger. La reconstruction prendra un an. Impossible dit l’opposition qui dénonce une promesse de campagne purement électoraliste.