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L’Allemagne, seul maître à bord de l’UE ?

Christophe Jakubyszyn.

Christophe Jakubyszyn. - -

Semaine décisive pour le sauvetage de l’euro. Au cœur de la bataille, un duo, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy - «Merkozy» comme on les a surnommés dans toute l’Europe. Et une question: la France est-elle en train de passer sous contrôle allemand ?

Cette question oppose notamment la droite à la gauche. Car l'opposition a multiplié ses attaques ces derniers jours contre les concessions trop importantes que Nicolas Sarkozy serait en train de faire à l’Allemagne.

Sarkozy veut «garder une convergence franco-allemande»

Jeudi, dans son discours de Toulon, Nicolas Sarkozy a expliqué aux Français qu’il n’y avait pas d’autres alternative que de partager une partie de notre souveraineté avec l’Allemagne et avec l’Europe : « Si l’Allemagne et la France sont désunies c’est l’Europe toute entière qui est affaiblie et désunie (...)L’Allemagne et la France ont fait le choix de la convergence, je ne reviendrai jamais sur ce choix ».
Plusieurs dirigeants de gauche ont critiqué ce discours, qu’ils assimilent à un renoncement. Arnaud Montebourg a comparé Angela Merkel à Bismarck. Même dans l’entourage de François Hollande, on a dénoncé la capitulation face à certaines exigences allemandes, comme le refus d’émettre des Eurobonds, des obligations européennes pour mutualiser la dette.

Nicolas Sarkozy fait-il la part belle aux exigences allemandes ?

En fait, on ne sait plus très bien qui doit donner des leçons à qui en matière de rapport avec l’Allemagne. Le candidat Sarkozy, lors d’un meeting en mars 2007, parlait de l’Allemagne à mots couverts en disant : « La France est un des rares pays au monde à n’avoir jamais cédé à la tentation totalitaire. La France n’a jamais exterminé un peuple, la France n’a pas inventé la solution finale, la France n’a pas commis de crime contre l’Humanité, la France n’a pas commis de génocide ».
François Fillon, hier après-midi, a donné une leçon à tous les détracteurs de l’Allemagne. Au fond, il aurait presque pu presque répondre au candidat Sarkozy en 2007. « C’est l’honneur du président de la République que de s’interdire toute attitude qui pourrait créer un fossé entre la France et l’Allemagne ; qui pourrait libérer des forces enfouies au fin fond de notre histoire et qui pourrait enclencher la mécanique infernale de la division ».

Une semaine cruciale pour l'euro

Mais le débat qui se joue cette semaine en Europe vaut mieux que ces invectives, de droite comme de gauche, à l’encontre des Allemands. Il y a un vrai débat qui se pose aujourd’hui en Europe. Qu’est-on prêt à faire pour sauver l’Euro ? Jusqu’où faut-il aller pour sauver notre monnaie commune ? Faut-il renoncer à une part de souveraineté, par exemple en faisant contrôler, valider nos budgets par l’Europe ?
C’est peut-être une bonne nouvelle. Ça voudrait dire aussi que nos hommes politiques seraient contrôlés au niveau européen pour éviter qu’ils ne conduisent notre pays à la ruine.

La cigale et la fourmi

Autre question: l’Allemagne doit-elle décider seule de la forme que doit prendre le fédéralisme européen ? Veut-on une banque centrale, comme la Bundesbank, obnubilée par la lutte contre l’inflation ? Ou veut-on une banque centrale européenne inspirée de la Réserve Fédérale américaine, préoccupée d’abord par l’emploi et la croissance et utilisant la monnaie comme une arme économique ? C’est ce débat là qu’on doit avoir en Europe, un débat à 27, et non pas un dialogue inégal entre la France et l’Allemagne, entre une cigale et une fourmi.

Écoutez «les Coulisses de la politique» du jeudi 1er décembre 2011 avec Christophe Jakubyszyn et Jean-Jacques Bourdin:

Christophe Jakubyszyn