L'UMP tente de résister à la poussée du FN dans le Sud-Est

LES ÉLECTIONS LÉGISLTIVES 2012 - -
par Yann Le Guernigou
BAGNOLS-SUR-CEZE, Gard (Reuters) - "C'est quand même pas des pestiférés ces gens-là ! A un moment, il faudra bien trouver un terrain d'entente". Les propos de ce vieux militant UMP du Gard sur le Front national ne détonnent pas dans le seul département français qui a placé Marine Le Pen en tête au premier tour de la présidentielle.
Jacques Laurence, qui est venu écouter le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé lors d'un meeting de soutien au député sortant Jean-Marc Roubaud à Bagnols-sur-Cèze, ne cache pas qu'il a voté pour la présidente du parti d'extrême droite, "parce qu'il y a eu trop de déceptions pendant cinq ans".
Il invoque plus particulièrement "le comportement et la personnalité" de Nicolas Sarkozy pour justifier son vote.
Son ami et voisin Jean-Luc Tranier, retraité comme lui, n'imagine pas pour sa part voter un jour pour le Front national, même lors d'un deuxième tour face à un candidat de gauche.
Il se dit en total désaccord avec les positions d'un parti dont "le seul objectif est de faire éclater l'UMP", même si son député, comme plusieurs autres dans la région, appartient à la Droite populaire, l'aile sécuritaire de l'UMP.
Si un duel gauche-FN a peu de chance de se produire dans le Gard, solidement ancré à droite, la possibilité d'un Front national présent au second tour dans ses six circonscriptions est bien réelle, ce qui pourrait compliquer la tâche de l'UMP en provoquant des triangulaires.
La situation est comparable dans le Vaucluse voisin, où Marine Le Pen a réalisé son score le plus élevé du premier tour de la présidentielle (27,03%), d'autant plus que l'UMP y lance trois jeunes pousses dont la nomination n'a pas été sans heurts.
Bénédicte Martin, qui a été choisie pour briguer le siège abandonné par Thierry Mariani dans la quatrième circonscription du département, sera ainsi confrontée à la candidature dissidente du suppléant de l'ancien ministre des Transports.
POLITIQUE LAXISTE
A quatre jours du premier tour des législatives, Jean-François Copé a sillonné mercredi les deux départements pour y marteler le message qu'un vote pour le Front national ferait avant tout les affaires de la gauche.
"Dans cette dernière ligne droite, il faut convaincre chacun de celles et ceux qui ont voté pour le Front national que, s'ils le refont aux législatives, ça fera passer par le jeu des triangulaires la gauche (...) c'est-à-dire l'exact inverse de ce qu'ils veulent", a-t-il dit à Bagnols-sur-Cèze.
La conséquence en sera, selon lui, qu'ils se retrouveront "avec une politique laxiste en matière de sécurité et démagogique en matière économique".
Les premières annonces du gouvernement socialiste, comme la suppression des tribunaux correctionnels pour les mineurs, le projet de récépissé pour les contrôles d'identité ou encore la relance du débat sur la dépénalisation du cannabis par la ministre du Logement Cécile Duflot sont autant de signes de la "folie" qui attend selon lui les Français en cas de victoire de la gauche aux législatives.
Côté économique, Jean-François Copé prédit un "matraquage fiscal massif des classes moyennes", alors que le gouvernement socialiste ne dispose pas "du premier euro pour financer toutes ses promesses électorales".
S'il revendique, comme Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle, le droit de s'adresser aux électeurs du Front national, le secrétaire général de l'UMP a toujours clairement exclu toute alliance avec ce parti.
"ÇA CHANGERAIT TOUT"
Des sondages récents, dont une étude Sofres publiée en début de semaine, montrent pourtant qu'une majorité de sympathisants des deux formations y est favorable (), ce qui se confirme sur un terrain comme le sud-est de la France.
Interrogé sur la question à Orange, le président du comité de soutien à la candidature de Bénédicte Martin, Pierre Rochette, répond qu'il a beaucoup d'amis frontistes.
"Moi je souhaite des alliances, ça changerait tout", a indiqué cet entrepreneur à des journalistes, avant de prédire que cela "arrivera à terme, au niveau local d'abord".
Les tentations sont déjà bien présentes.
Un candidat UMP des Bouches-du-Rhône, Roland Chassain, s'est dit prêt à se désister en faveur du FN pour faire battre le président socialiste de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur Michel Vauzelle.
Il a été rappelé à l'ordre par Jean-François Copé, qui lui a fait savoir que "dans une démocratie qui fonctionne bien, le principe c'est qu'on ne s'occupe pas du deuxième tour avant qu'on ait terminé le premier tour".
Pour les mêmes raisons, l'UMP se refuse à annoncer si elle pourrait donner des recommandations de vote dans les circonscriptions où elle ne passerait pas le premier tour.
La question sera tranchée officiellement lors d'un bureau politique du parti convoqué lundi, ainsi que le sort de Roland Chassain et de ceux qui seraient tentés de l'imiter.
La ligne "ni Front national, ni front républicain" semble tenir la corde. Elle avait déjà prévalu lors des dernières cantonales de 2011 à l'initiative de Jean-François Copé avec le soutien de Nicolas Sarkozy mais avait été contestée par le Premier ministre François Fillon.
Edité par Yves Clarisse