La réforme des parrainages est nécessaire

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Il arrive même à Marine Le Pen de dire des choses sensées – et ce n’est pas parce que sa protestation est intéressée qu’elle est forcément infondée. En l’occurrence, libre à chacun d’apprécier comme il veut les positions du FN et de critiquer sa présidente – qui est en effet critiquable ; il n’empêche qu’un système de présélection des candidats à la présidentielle qui peut entraver la représentante d’un parti qui avoisine 17% d’intentions de vote et qui dépasse 10% à tous les scrutins, un tel système ne peut pas être considéré comme juste. Donc, il faut le réformer. Peut-être pas comme Marine Le Pen le souhaite, mais en tout cas, l’améliorer.
Est-ce qu’on peut sérieusement croire que le FN n’arrive pas à réunir ces 500 parrainages ? C’est un argument que Jean-Marie Le Pen a souvent utilisé…
Bien sûr que ça sent le subterfuge électoral à plein nez. C’est une façon, pour Marine Le Pen, de se poser en victime des grands partis et de « l’établissement » comme disait son père – alors même que toute sa stratégie est au contraire de s’institutionnaliser, de se normaliser. A la limite, c’est un argument de plus pour une réforme : rendre le système des parrainages plus équitable, ce serait priver l’extrême-droite d’un argument trop commode. Sur le fond, le filtrage des candidats reste nécessaire, pour éviter qu’il y en ait trop, mais il faut retirer aux élus le monopole de la sélection – ne serait-ce que pour empêcher ce rituel pas franchement démocratique de la pêche aux signatures. Le Conseil constitutionnel lui-même avait déploré en 2007 certains « marchandages ».
Quelle serait la bonne solution pour réformer le système ?
Permettre une alternative aux parrainages d’élus avec une sorte de pétition de citoyens (par exemple 500 000 ou 1 millions d’électeurs) qui validerait telle ou telle candidature. Et en parallèle, augmenter le nombre de signatures d’élus nécessaires. Parce que le défaut du système actuel, ce n’est pas seulement qu’il peut handicaper un parti objectivement populaire comme le FN ; mais qu’en même temps, il laisse passer à travers ses mailles des candidats qui n’ont rien à faire dans la présidentielle. Il ne s’agit pas de mépriser les « petits » candidats ; mais on peut considérer que les chasseurs, les défenseurs des animaux et chaque sous tendance du trotskisme français n’ont pas forcément besoin d’avoir un prétendant à l’Elysée pour que la France soit une démocratie…
Marine Le Pen réclame aussi l’anonymat pour les élus qui donnent leur signature à un candidat – elle dit que c’est pour éviter les risques de pressions.
Et pourtant, la transparence a été imposée en 1976 pour éviter des arrangements et des pressions – et encore elle n’est que relative puisqu’on ne publie que 500 noms tirés au sort. Au contraire, on devrait tous les publier : les électeurs ont le droit de savoir à qui leur maire ou leur élu local a donné sa signature parce que d’une certaine façon, c’est en leur nom qu’il le fait. Le fond du problème, c’est que le FN a peur que cette publicité soit dissuasive pour les élus : ça, ce n’est pas une affaire de réglementation, mais de réputation. Autrement dit : ça tient aux idées qu’il défend. Et au fait qu’une majorité de Français y sont clairement hostiles.