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Mistral: faute d'accord entre Paris et Moscou, les navires sont toujours à quai

DROIT DE SUITE - Chaque matin retour sur un sujet, un personnage, un lieu qui a marqué l'actualité de ces derniers mois. Aujourd'hui, que sont devenus les acteurs? Les promesses ont-elles été tenues? Y-a-t-il eu des changements sur le terrain? Ce mercredi, RMC est revenue sur l'affaire des navires Mistral jamais livrés à la Russie.

Que sont devenus les deux Mistral construits à St Nazaire pour les Russes ? Les deux navires n'ont jamais été livrés à la Russie. En novembre 2014, en raison de la crise ukrainienne, la livraison du "Vladivostok" et du "Sebastopol" est suspendue. Ils mouillent donc toujours au port de Saint-Nazaire. Fin avril, François Hollande a admis que la France pourrait être amenée à rembourser les montants déjà versés par la Russie. Pour rappel, la France et la Russie avaient conclu en juin 2011, sous le mandat de Nicolas Sarkozy, un contrat d’environ 1,2 milliard d’euros pour ces deux porte-hélicoptères français.

Si, à l'heure actuelle, ces deux engins sont toujours à quai dans le port de Saint-Nazaire, il est impossible de s’en approcher à moins de 200m. "C'est un enclos complètement fermé, grillagé avec à certains emplacements du barbelés. On ne le voit que des parkings ou de la route, mais cet enclos est protégé et non accessible", confirme Françoise, syndicaliste sur les chantiers navals.

"Revendable, mais à quel coût?"

Pour autant, est ce qu’un jour ces Mistral repartiront en mer? Pour cela, il faudrait trouver un pays prêt à les racheter or la Russie s’y oppose et de toute façon il est pratiquement impossible de les vendre un autre pays. "La problématique c'est qu'actuellement toute la signalétique et l'informatique à l'intérieur est tout en russe, explique Françoise. Il pourrait être revendable, mais à quel coût? S'il faut tout remettre au goût d'un potentiel pays acheteur cela à un coût".

Ce n'est pas tout, "il faut savoir que selon le pavillon sous lequel navigue un bateau, la réglementation n'est pas la même. Il y a des pays dans lesquels les réglementations sont beaucoup plus dures que celles de la Russie. Donc cela pourrait nécessiter d'autres mises aux normes qui pourraient coûter très cher". De plus, les termes du contrat ont fortement tendu les relations diplomatiques et commerciales entre les deux pays. Ainsi, Moscou demande le remboursement des navires estimé à 1,2 milliards d’euros alors que Paris, de son côté, ne veut pas verser au-delà d’un milliard.

"Nous avons été extrêmement naïfs"

"Très clairement, du point de vue russe, la confiance faite à la France en tant que fournisseur et partenaire de technologie en matière d'armement est rompue. Et je ne pense pas que cette confiance sera susceptible de revenir", juge Philippe Migault, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques. Il ajoute: "Pendant que nous prenons des sanctions vis-à-vis de la Russie, la part de commerce des Américains avec les Russes augmente".

Un constat "paradoxal" pour cet expert: " Alors que nous avons cédé à des pressions américaines pour prendre des sanctions contre les Russes, pendant ce temps-là, les entreprises américaines augmentent leur business en Russie. Je pense que dans cette affaire nous avons été extrêmement naïfs et absolument pas pragmatiques d'un point de vue diplomatique". A noter enfin que le fait de garder à quai ces deux navires coûte plus d’un million d'euros par mois au constructeur naval, rien que pour les frais de gardiennage et de maintenance.

Amandine Dubiez avec Maxime Ricard