Disquaire Day: "c'est le jour de Pâques pour les amateurs de disques", affirme Philippe Manœuvre

Le rendez-vous annuel des disquaires indépendants, le Disquaire Day, est de retour ce samedi. L'occasion d'aller dénicher les vinyles rares chez les disquaires indépendants, pour soutenir la profession. Une fête du vinyle qui réunit 220 disquaires dans 90 villes de France. Pour inciter les collectionneurs ou amateurs, 270 vinyles inédits, collectors ou très rares sont mis en vente pour cette occasion.
Preuve que la galette noire n'est pas morte: 6.000.000 vinyles ont été vendus en 2024. Et c'est une première depuis 1987, le disque vinyle surpasse même le CD en chiffre d’affaires. C'est le Syndicat d’écoutes phonographiques (SNEP) qui le révèle dans son Bilan du marché de la musique enregistrée en 2024 publié fin mars. Pour la première fois en 11 ans (hors période covid), les ventes de supports physiques connaissent une croissance franche de +1,3 %, portées par le succès du vinyle qui génère un chiffre d’affaires de 98 millions d'euros contre 91 millions d'euros pour le CD.
Un objet indémodable
Pour Philippe Manoeuvre, journaliste et critique musical, c'est bien la preuve que le vinyle a de beaux jours devant lui: "C'est très rassurant. C'est comme si les gens disaient que finalement de tout le 20ème siècle 'nous on garde le vinyle, on l'emmène avec nous, ça continue à nous plaire, ce n'est pas un objet périmé, on aime ça, on le collectionne, on l'écoute, on vit avec".
"Le vinyle c'est un objet culturel parfait, quand on réfléchit. C'est une chose étrange qui nous donne beaucoup de bonheur, plaisir, de nostalgie aussi parfois", s'extasie-t-il au micro d'Anaïs Matin.
Mais les vinyles, ce sont aussi des objets décoratifs. "Des jeunes sont très fiers d'avoir chez eux des vinyles des Clashs, des Sex-Pistols ou d'Elvis Presley", affirme le journaliste. "On fabrique même des cadres pour glisser les vinyles dedans, tout est prévu".
"C'est le jour de Pâques"
Alors ce Disquaire Day, c'est une occasion en or: "c'est un peu le jour de Pâques pour les amateurs de disques parce qu'il faut aller chez le disquaire indépendant, pas chez une grosse chaîne".
"Et il y a des disques de Prince, Bob Marley, Oasis, David Bowie etc. Cette année, il y a même un album live de David Bowie. Ça peut être des groupes moins connus, des groupes de rap aussi parce qu'ils s'y mettent".
Pour tous ceux qui se déplaceront, "vous allez trouver ces éditions rares, il y a Etienne Daho, Eurythmics etc". Car petite particularité pour attirer, "ils fabriquent des disques nouveaux qui sont mis en vente le samedi". Par conséquent: "devant tous les disquaires indépendants de France en ce moment, il y a des queues qui se forment. Parfois une centaine de personnes attendent l'ouverture des magasins parce que ce sont des éditions rares, limitées et qu'on va augmenter chacun à son rêve".
"C'est le côté collectionneur cher aux amateurs de vinyles", remarque Philippe Manoeuvre.
Mais cette ferveur peut également pousser à dépenser des sommes astronomiques. Certains vinyles rares coûtent de plus en plus cher. Il explique ce phénomène: "c'est la collectionnite. Par exemple, la première édition des Beatles Please Please Me, c'est un disque qui s'est vendu à des millions d'exemplaires. Mais la première édition anglaise n'a duré que quelques semaines, et il y en a un qui vient de se vendre 9.000 euros sur Ebay. C'est un disque très très rare".
Les disques de Philippe Manoeuvre
Son tout premier vinyle? "C'était en 1968, j'avais 14 ans, et avec mon argent de poche je me suis acheté un disque des Equals qui s'appelait Baby, Come Back. C'était du rock. Et à l'époque on avait 5 francs d'argent de poche par semaine et miraculeusement un disque coûtait 4,80 francs", se rappelle-t-il.
Plus tard, dans les années 1980, à l'époque des CD, Philippe Manoeuvre a revendu toute sa collection. Mais derrière, il a finalement tout racheté: "dans les années 90, j'ai tout recommencé à racheter, j'ai reconstitué ma collection et aujourd'hui j'en suis très content. Et je les écoute franchement tous les jours".
Sur une île déserte, pas de doute, "j'emmènerai le double album de Jimi Hendrix Electric Ladyland, parce que d'abord c'est plus long qu'un album simple et puis Hendrix ça reste une inspiration pour tous les guitaristes, amateurs de musique, de blues. C'est un titan musical".
Une passion qu'il a également transmise à ses enfants. A son fils de 13 ans, il lui a offert le double album rouge des Beatles, et à sa fille le double album bleu.
"Ils adorent parce qu'il y a aussi des musiques très enfantines et d'autres plus sérieuses. Tout le monde s'y retrouve avec les Beatles", explique-t-il.
Et tout le monde peut s'y intéresser. Il conclut: "aujourd'hui on peut s'éduquer tout seul, on est à un clic de tout. Il suffit de lire les articles, se renseigner, on peut tout écouter sur Youtube aussi, on est dans un monde fabuleux pour la musique".