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Documentaire sur Rocco Siffredi: "Le porno, dès que ça devient un métier c'est beaucoup moins fun"

L'acteur Rocco Siffredi.

L'acteur Rocco Siffredi. - Tiziana Fabi - AFP

Le documentaire Rocco, de Thierry Demaizière, sort ce mercredi en salles et suit l'acteur porno Rocco Siffredi dans sa vie quotidienne. Un film dans lequel le harder dévoile ses états d'âmes et sa vie privée, entre culpabilité à exercer son métier et paternité. Des états d'âmes partagés, la culpabilité en moins, par HPG, lui-même harder, joint  par RMC.fr.

HPG est acteur, réalisateur et producteur de films pornographiques. Il a aussi réalisé plusieurs longs métrages dans le cinéma traditionnel (dont Les mouvements du bassin, en 2011, avec Éric Cantona et Rachida Brakni). Son dernier film, Fils de, disponible en DVD, met en scène sa vie quotidienne de jeune papa et montre sa difficulté à allier vie professionnelle et vie familiale. Il a deux enfants de 4 et 6 ans.

"Des acteurs pornos qui ont des états d'âmes, comme Rocco Siffredi dans son documentaire Rocco? Plus le corps est dématérialisé plus on a besoin de rattraper par une fonction cérébrale. Pour moi c'est un métier comme un autre, mais particulier. Il faut avoir une âme de bucheron, ne pas avoir de sentiments. Il y en a beaucoup qui arrêtent: ils le font un temps et puis arrêtent. Dès que ça devient un métier c'est beaucoup moins fun, il faut arriver à faire de son corps un outil. C'est beaucoup moins facile qu'il n'y paraît. Et pour ceux qui durent, comme moi, on est bien obligé de cérébraliser et d'avoir une vraie réflexion sur notre métier pour continuer à y prendre du plaisir et en faire un travail qui s'insère dans la vie sociale, d'autant plus quand on a une famille.

Je fais un métier que je n'aimerais pas que ma femme fasse, et j'en viendrais aux mains si quelqu'un voulait embaucher plus tard mes enfants pour faire acteur ou actrice porno.

Donc à moins d'être un couple échangiste, mon métier est effectivement incompatible avec une vie de famille. Mon métier est un problème, mais j'ai 50 ans, et ça fait 30 ans que je me prostitue – puisque être acteur porno c'est comme se prostituer -, j'ai toujours vécu et grandit comme ça.

"Harder? On ne choisit pas ses horaires, on est sous-payés"

C'est fun pour des gens comme moi qui l'assument bien et qui en vivent bien. Je suis producteur réalisateur et je fais ce que je veux.

Mais pour celui qui est dépendant de gens comme moi, c'est moins fun, c'est sûr: ils ne choisissent pas leurs horaires ni avec qui ils vont travailler, ils sont sous-payés, c'est aléatoire, ils ne gardent pas les droits de leurs films… Il n'y a plus que 5 acteurs qui arrivent à en vivre, le reste ce sont des amateurs qui s'épuisent à me faire mon chiffre d'affaires.

Mais si on se plaint on doit arrêter ce métier. Si tu te sens coupable de faire quelque chose, cesse de le faire. Moi je me sens coupable mais je me suis assis sur ma culpabilité, donc je continue.

Et puis si j'arrêtais le boulot de harder, je serais comme les vieux rockers, je me sentirais vieillir à la retraite donc je continue coûte que coûte. Mais j'aime bien mon métier, c'est ma partie fun, mon côté Bukowski. Je me suis construit comme ça, donc on doit me prendre comme ça. En vieillissant on est moins en forme qu'avant, donc ça devient plus un plaisir intellectuel, d'autant que je continue à faire des dérivés dans le cinéma traditionnel, donc ça rend mon métier d'autant plus riche intellectuellement. Mais c'est toujours plaisant physiquement, bien sûr. Je n'ai jamais voulu être astronaute, j'ai toujours voulu être harder.

"Maintenant dans le porno, l'amateurisme c'est fini"

Je ne suis pas d'accord avec Rocco Siffredi quand il dit que le porno est devenu trop violent, crade. Maintenant dans le porno, l'amateurisme c'est fini, on revient à des films dits premium. Et le discours du 'c'était mieux avant', je le laisse aux nostalgiques.

Je fais 21 jaquettes pour 21 pays du monde, j'ai 2 avocats qui bossent avec moi, je fais des vraies déclarations de paie, c'est plus comme avant, on est très surveillé.

La gratuité impacte le marché donc il faut être très bon et très pro. Fini le bon temps où tout ce qu'on pouvait filmer pouvait être vendu".

Propos recueillis par Philippe Gril