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"Venez parler": le patron du cinéma d’Arpajon, victime des émeutes, interpelle les casseurs

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Le patron du cinéma d’Arpajon (Essonne), pillé pendant les émeutes, souhaite rencontrer et dialoguer avec les jeunes qui ont commis les dégradations.

Il était flambant neuf, avec cinq salles et 600 fauteuils rouges, et avait rouvert en octobre dernier après un an de travaux. Mais ce cinéma, à Arpajon (Essonne), a été victime des émeutes. Dans la nuit du 29 au 30 juin, en moins d’une minute, les émeutiers défoncent le hall d’entrée, volent des écrans plats. Une demi-heure plus tard, une voiture-bélier, volée chez le concessionnaire d’à côté, explose la façade vitrée. Et toute la nuit, des pillards viennent se servir en boissons et snacks. Sur les bandes de vidéosurveillance, Charles Vintrou, le patron, a reconnu des clients.

"Des jeunes entre 13 et 17-18 ans qui viennent le week-end au cinéma… Quand on voit un jeune se pointer au ciné, quand on les croise dans la rue, on ne peut pas s’empêcher de se dire que c’est peut-être l’un des gars qu’on a vu sur la vidéo. C’est vraiment dommage, c’est bête", regrette-t-il au micro de RMC.

Il y en a pour 100.000 euros de réparations, qui seront pris en charge par son assurance. Mais Charles Vintrou est en colère. Il s’engage pour les jeunes de sa ville, propose la place de ciné à 4€, avec une programmation adaptée. Aujourd’hui, il veut comprendre la violence.

"S’ils avaient compris tout le mal qu’ils faisaient, j’espère qu’ils ne l’auraient pas fait… J’ai encore de l’espoir pour la nature humaine. C’est aussi pour ça que j’aimerais bien qu’on s’explique, un jour, les yeux dans les yeux", explique le patron du cinéma.

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"Il faut qu’on vive ensemble"

Rencontrer les auteurs des infractions, ça existe et ça porte un nom: la justice restaurative. Des dispositifs existent depuis 2014 mais ils restent peu connus. Le principe: permettre le dialogue entre une victime et un auteur d’une infraction de même type, pour permettre la réparation, en complément de la justice pénale.

Seul préalable: l’auteur doit avoir reconnu les faits. L’objectif est d’aider la victime à se reconstruire et l’auteur à assumer ses actes, en complément de la justice pénale.

"Ces jeunes qui sont venus, on habite à côté d’eux, souligne Charles Vintrou. Il faut qu’on vive ensemble. Donc venez parler, plutôt que de venir casser. J’y suis prêt. Sinon, qu’est-ce qu’il va se passer? Ça va recommencer à la prochaine étincelle, ça va être de nouveau le bordel. Donc parlons."

En 2021, 128 mesures de justice restaurative ont été menées à bien. C’est peu mais ça augmente chaque année. Et c’est possible dans le cadre de violences urbaines, assure le ministère de la Justice à "RMC s’engage pour vous". Mais il n’y aura pas de dispositif particulier car "c’est une justice sur-mesure", nous dit-on.

Si comme Charles Vintrou, vous en ressentez le besoin, vous pouvez vous rapprocher d’une association de victimes ou du bureau d’aide aux victimes (BAV) du tribunal le plus proche de chez vous, qui vous accompagnera dans votre démarche.

Si l’auteur d’une infraction veut y participer, il peut s’adresser au service chargé de son suivi judiciaire. Et si vous hésitez, un petit conseil: regardez le film "Je verrai toujours vos visages" de Jeanne Herry. Sorti en mars dernier, il lève le voile sur la justice restaurative et ça vaut le coup d’œil.

Amélie Rosique