Après l’assaut de Saint-Denis, certaines familles attendent encore un logement: "C'est inadmissible"

Sur les 70 personnes privées de toit, un quart seulement a retrouvé un logement - JOEL SAGET / AFP
L'attente devient insupportable pour les habitants du 48 rue de la République. Deux mois après l'assaut mené par le Raid contre les terroristes dans un immeuble de Saint-Denis, les familles sont toujours en attente d'une solution pour être relogées. C'est pourquoi, ce mardi, ils manifesteront avec le DAL (Droit au logement) devant leur ancien immeuble. Plus précisément, sur les 70 personnes privées de toit, un quart seulement a retrouvé un logement. Sur les 29 familles, 14 sont en cours de relogement définitif et 15 familles sont encore sans aucune proposition.
Après avoir été hébergées en urgence dans un gymnase, elles vivent aujourd'hui dans des chambres d'hôtel ou des résidences sociales, sans avoir pu récupérer leurs affaires. Parmi ces familles, Maria, 4 ans, et son père Abdel rencontrés par RMC. Aujourd'hui, deux mois jour pour jour après l'assaut du Raid, la situation est devenue bien trop compliquée à vivre. "On a seulement un frigo, une plaque de cuisson, un peu de vaisselle, des lits en ferraille… Cela fait un peu hôpital, voire prison. Ce n'est pas très chaleureux", déplore Abdel.
"Encore un jour comme deux mois"
Et d'ajouter: "Il y a beaucoup de cafards donc c'est gênant avec ma fille pour des questions évidentes d'hygiène". Autre détail mais non des moindres, les murs restent blancs car Abdel n'ose même pas les décorer. "On ne sait pas combien de temps on va rester donc on ne s'approprie pas les lieux, justifie-t-il. On peut rester encore un jour comme deux mois…" Avec ce logement excentré, le quotidien est donc devenu très compliqué. "Par exemple, je ne peux pas recevoir de courrier car je n'ai pas de boîte aux lettres. Je fais donc la queue à la mairie avec les SDF".
Pourtant les politiques s'étaient engagés à leur trouver de vrais logements avant Noël. Or depuis le 18 novembre, Abdel assure n'avoir eu aucune nouvelle de l'Etat. Il se sent donc oublié. "Les conditions dans lesquelles tout cela se passe sont inadmissibles. Ce qu'on a vécu est extrêmement difficile et l'attente est tout aussi dure. Nous n'avons aucun rendez-vous avec le service logement, aucune visite d'un ministre alors qu'on aimerait bien les voir. Symboliquement c'est très important pour nous". Pour l'heure donc les solutions de relogement tardent à venir. En cause: un bras de fer qui dure entre la mairie et la préfecture de Seine-Saint-Denis. Les logements sociaux disponibles sont rares et les deux institutions peinent à travailler ensemble.
"Que l'Etat tienne ses promesses"
"Quand on a 39 familles dans une situation d'extrême urgence liée à des faits de terrorisme, c'est évident que l'on ne peut pas demander à la ville de se débrouiller toute seule, estime Philippe Caro, adjoint au logement à la mairie de Saint-Denis. Il faut que la préfecture de Seine-Saint-Denis tienne les engagements pris par la ministre du Logement. Il faut donc que l'Etat mobilise les réservations qu'il a chez les bailleurs pour permettre le relogement de ces familles".
C'est pourquoi, Ahoua N'Goran, qui habitait lui aussi au 48 rue de la République, a créé une association pour que tous les habitants soient relogés et indemnisées. "Nous demandons que l'Etat tienne ses promesses à savoir reloger de façon durable tous les habitants de l'immeuble et reconnaître notre statut de victimes. Ce qui n'est pas le cas". Pour Philippe Caro, "nous sommes en état d'urgence, il faudrait aussi que ce soit l'état d'urgence sociale pour ces familles-là".