Centres de rétention: "S'il n'y a pas les associations, on ne sait pas ce qu'il se passe"

Le Sénat a voté, lundi, un texte pour écarter les associations des centres de rétention administrative (CRA). Ces dernières y exercaient leur mission de conseil juridique aux étrangers retenus en vue de leur expulsion.
Le texte, soutenu par Bruno Retailleau, doit encore être voté à l'Assemblée nationale. Selon le ministre de l'Intérieur, les associations "outrepassent leurs missions et les retournent en réalité contre l'État en entravant son action par pur militantisme".
Cinq associations s'occupent actuellement du conseil juridique dans ces centres. Elles sont mandatées par l'État. Mais selon Marie-Carole Ciantu (CI1TU), la sénatrice à l'origine de ce texte, elles multiplient volontairement les recours contre les décisions d'éloignement du territoire français: "Même si elles pensent qu'il n'y aura pas de résultat, elles ne dissuadent pas les étrangers en situation irrégulière de le faire, pour que la politique de l'État échoue."
Les associations craignent des décisions partiales
Cette accusation est niée en bloc par les associations présentes dans les centres de rétention. Leurs membres présents dans ces structures sont des "juristes qui vont informer les personnes retenues sur leurs droits et qui vont les accompagner dans leurs démarches", explique Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France terre d'asile, l'une des cinq associations. "C'est indispensable, c'est même une exigence constitutionnelle. S'il n'y a pas les associations, on ne sait pas ce qu'il se passe", craint-elle.
"Jamais ces juristes ne vont prendre les décisions à la place des personnes", insiste-t-elle.
Najat Vallaud-Belkacem ajoute que les interventions des associations au sein des CRA est "très encadrée par la loi". "On parle de gens qui sont enfermés, retenus sans qu'aucun juge ne se soit prononcé sur leur situation", souligne-t-elle.
Le texte voté par le Sénat propose de remplacer ces juristes par des agents de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui est un organisme sous la tutelle du ministère de l'Intérieur. "Si c'est l'administration elle-même qui vient informer les individus concernés pour les aider à se défendre contre une décision qui a été prise par l'administration, il y a un problème, c'est une administration qui est juge et partie", pointe du doigt Najat Vallaud-Belkacem.
Le texte prévoit de transférer cette compétence vers l'OFII d'une part pour informer les étrangers retenus, et dans un deuxième temps vers les avocats pour l'assistance juridique. Cela entraînerait selon les auteurs du texte des économies pour l'État de 6,5 millions d'euros.