RMC
Police-Justice

Dominique Pélicot aurait-il pu être arrêté dès 2010? "Il a passé sa vie à berner les gens"

placeholder video
Dominique Pélicot a-t-il un passé criminel antérieur aux viols de Mazan? Mis en examen dans le cadre de deux "cold cases", il reconnaît une tentative de viol mais nie un meurtre avec viol, tous deux commis dans les années 90. "Une vie entière de mensonges", selon le journaliste Laurent Valdiguié, qui publie un livre-enquête à ce sujet.

Dominique Pélicot a "passé sa vie à berner les gens, à commencer par sa femme et ses enfants [...] Une vie entière de mensonges." C'est ce qu'affirme sur RMC le journaliste Laurent Valdiguié, auteur du livre Fetiche45 - Les autres vies de Dominique Pelicot, paru ce mercredi 2 mai aux éditions du Seuil.

L'auteur du livre s'est intéressé au passé de Dominique Pélicot, à l'avant Mazan, commune où depuis son domicile il a drogué et violé - avec au moins 50 hommes qui se sont succédé - son épouse Gisèle Pélicot pendant presque dix ans, de 2011 à 2020. "Qui est ce Pélicot de 58 ans, en 2011, quand il commence ses viols à domicile? Qu'est-ce qu'il a fait avant?", s'interroge ainsi Laurent Valdiguié. En somme, était-il déjà un violeur?

Car l'homme condamné le 19 décembre dernier à 20 ans de réclusion criminelle - peine maximale encoure dont il n'a pas fait appel - est mis en examen dans le cadre de deux "cold cases". Il a d'ailleurs été entendu par les enquêteurs le 30 janvier dernier. Un meurtre avec viol à Paris en 1991, qu'il nie et une tentative de viol en Seine-et-Marne en 1999, qu'il reconnait, ayant été confondu par son ADN.

"Par rapport à Marion, c'est bien moi"

Lors de son procès devant la cour criminelle départementale du Vaucluse, à Avignon, de septembre à décembre, il avait donné quelques détails concernant ces deux affaires. "Par rapport à [Marion, prénom d’emprunt de la victime de tentative de viol en 1999], c’est bien moi. J’ai retiré son tee-shirt, ses chaussures et son pantalon, [mais] je n’ai rien fait, cela m’a paniqué qu’elle se détache", avait-il dit. En revanche, il a nié en bloc avoir eu un rôle dans le meurtre avec viol de Sophie Narme, agente immobilière tuée à Paris en 1991.

Il y a pourtant des similitudes du mode opératoire : les deux victimes étaient de jeunes agentes immobilières, 23 ans chacune, à qui un homme s’était présenté sous un faux nom pour visiter un appartement. Les deux femmes ont été également déshabillées par le bas, de la même manière, et une forte odeur d’éther avait été sentie sur la scène du crime de Sophie Narme, substance utilisée pour agresser Marion en 1999.

Laurent Valdiguié face aux GG - 02/05
Laurent Valdiguié face aux GG - 02/05
24:57

100 € d'amende en 2010

Autre élément important qu'aborde Laurent Valdiguié dans son livre, c'est une garde à vue de 2010. 10 ans avant son arrestation à Carpentras pour avoir filmé sous les jupes de clientes d'un supermarché, qui précipitera la chute de Dominique Pélicot et la découverte de l'affaire des viols de Mazan, celui-ci avait en réalité déjà été interpellé pour les mêmes faits, dans un supermarché mais cette fois-ci en Seine-et-Marne.

C'est lors de cette garde à vue que son ADN est prélevé. Mais à l'époque, "l'infraction de voyeurisme n'existe pas, le procureur de Meaux demande aux enquêteurs de retrouver les victimes, sans elles, on ne peut pas faire grand chose", relate sur le plateau des Grandes Gueules Laurent Valdiguié. Dominique Pélicot écope d'une "amende de 100 euros".

"Dysfonctionnements judiciaires"

À cette époque, comme en 2020, il affirme alors qu'il s'agit d'une "pulsion", qu'il fait ça "pour la première fois, il minimise, il passe sa vie à berner les gens à commener par sa femme et ses enfants", poursuit le journaliste. Mais surtout, son ADN permet à la justice, dès 2010, de l'identifier pour les deux "cold cases" précédemment évoqués. Mais aucune procédure ne se met en place. Laurent Valdiguié affirme que le ministre de la Justice Gérald Darmanin a ordonné une inspection sur ces "dysfonctionnements judiciaires", après l'avoir alerté à ce sujet.

Dominique Pélicot pourrait être impliqué dans d'autres viols ou tentatives de viols. Peu de temps après sa condamnation, une femme d'une quarantaine d’années s'est présentée devant la police judiciaire à Paris et l'a accusé de l’avoir agressée sexuellement il y a trente ans, a révélé M6. Elle a affirmé avoir reconnu son visage lors du procès des viols de Mazan. Laurent Valdiguié estime de son côté que le "point de départ" possible des agissements de Dominique Pélicot est 1987, année durant laquelle le couple Pélicot se sépare brièvement.

Son ADN prélevé, "il ne peut plus jouer à l'extérieur"

Dominique Pélicot est également visé par une plainte de sa fille Caroline Darian, pour viols, alors que des clichés d'elle en sous-vêtements ont été retrouvés dans son ordinateur. Lors du procès, celle-ci a sommé son père d'avouer l'avoir violée, ce qu'il a nié en bloc.

Ce prélèvement ADN de 2010 a en tout cas tout changé son mode opératoire, toujours selon Laurent Valdiguié. Car cela coïncide avec le début de ses viols à domicile "Il ne peut plus jouer à l'extérieur, s'il se fait prendre sur une scène de crime, son ADN est dans le fichier", avance le journaliste, qui considère comme "vertigineux l'ampleur du mensonge et de la manipulation" opérés par Dominique Pélicot.

Léo Manson