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Police-Justice

Eric Masson, policier abattu à Avignon: procès du meurtrier présumé, qui nie en bloc

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Le procès du meurtrier présumé du brigadier Eric Masson, abattu en 2021 sur un point de deal en plein jour à Avignon, s'ouvre ce lundi 19 février.

Trois ans après la mort du brigadier Eric Masson, abattu en plein jour sur un point de deal à Avignon, son meurtrier présumé sera jugé à partir de lundi. Malgré les charges accablantes, il nie les faits, une position "intenable" pour les parties civiles.

La scène était banale: le 5 mai 2021, deux policiers décident de surveiller les trafiquants de drogue qui perturbent la vie d'un quartier historique de la cité des papes, à l'intérieur des remparts de la vieille ville.

"La culpabilité ne fait aucun doute"

Après avoir assisté à une transaction, ils contrôlent la cliente. Puis deux jeunes hommes s'approchent et les prennent à partie. Pour une raison inexpliquée, l'un des deux, porteur d'une sacoche, tire au moins deux fois à bout portant sur Eric Masson, qui s'effondre. Les deux jeunes s'enfuient et le tireur vise cette fois le second policier, sans l'atteindre.

La mort de ce brigadier de 36 ans, père de deux fillettes, passionné par un métier transmis par son père, suscite une émotion énorme, déclenchant un hommage national et ravivant le malaise policier. 

Quatre jours plus tard, deux hommes de 19 et 20 ans sont interpellés sur l'autoroute en direction de l'Espagne. Le plus jeune, Ilias Akoudad, est alors désigné comme le tireur par au moins deux témoins, son camarade de fuite et le coéquipier d'Eric Masson. 

Mais, pendant plus de deux ans d'investigations, Ilias Akoudad, aujourd'hui âgé de 22 ans, nie. Il refuse même de participer à la reconstitution, expliquant qu'il n'était pas rue du Râteau ce jour-là.

L'enquête montrera pourtant qu'une ligne téléphonique, dont il a finalement reconnu l'utilisation, avait borné dans cette rue à l'heure des faits. Et des résidus de tirs ont été retrouvés sur ses vêtements. 

"Sa position devrait évoluer au cours du procès, elle n'est pas tenable. La culpabilité ne fait aucun doute. La sérénité commande que les choses soient dites face à autant de charges", estime Me Philippe Expert, avocat des parents d'Eric Masson et de son frère et sa soeur, eux aussi gardiens de la paix.

"Je ne vois pas comment il peut rester dans ce système de défense, on attend des explications, même si elles sont ridicules", embraye Me Sabine Gony-Massu, avocate de la compagne d'Eric Masson, de ses filles et de Romain, son coéquipier.

Le ténor du barreau de Lille, Frank Berton, chargé avec Me Elise Arfi de défendre Ilias Akoudad, n'a pas souhaité s'exprimer avant le début des débats devant la cour d'assises du Vaucluse, censés durer deux semaines. 

Déjà condamné six fois, notamment pour trafic de stupéfiants, le jeune homme, poursuivi pour meurtre et tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique, risque la perpétuité, le statut de policier d'Eric Masson étant une circonstance aggravante "lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur".

Témoin RMC : Linda Kebbab - 19/02
Témoin RMC : Linda Kebbab - 19/02
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Mais savait-il, comme le conclut l'enquête, qu'il s'agissait d'un policier ? Eric Masson portait-il son brassard à la main ? A-t-il crié "police" ? Pourquoi le meurtrier a tiré alors qu'il n'était pas contrôlé ? Autant de questions qui seront au coeur d'un procès qui s'annonce "extrêmement tendu, forcément politique", selon Me Charlène Neveu-Sanchez, qui défend le logeur des fugitifs.

Ce meurtre est "une plaie difficile à refermer", qui "a remué la ville et les policiers dans son ensemble", commente Florence Galtier, la procureure de la République d'Avignon, qui représentera le ministère public pour cette audience. Deux autres jeunes seront jugés pour des délits connexes qui relèvent habituellement de la correctionnelle, insistent leurs avocats.

Ayoub Abdi, 23 ans, qui accompagnait le tireur le jour des faits et a fui avec lui, et Ismaël Boujti, 24 ans, qui a prêté aux deux jeunes hommes en fuite sa cave, qui servait d'épicerie clandestine, seront jugés pour soustraction d'un criminel à l'arrestation ou aux recherches.

Les témoignages d'Ayoub Abdi et de Romain, le collègue d'Eric Masson, seront déterminants. Depuis le drame, ce dernier est toujours dans la police, mais loin d'Avignon. Et ce procès sera "une étape difficile" pour lui et toutes les parties civiles, qui devraient être soutenues par de nombreux policiers dans la salle d'audience, a précisé Me Gony-Massu.

CA avec AFP