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Police-Justice

"Expliquez-nous": Mélenchon contre-attaque avant son procès, justifié?

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A deux jours de son procès pour rébellion, Jean-Luc Mélenchon et ses amis dénoncent une procédure politique. C'est l’affaire de la perquisition au siège de la France Insoumise qui avait mal tourné avec des images que l’on a tous en tête.

Il y a presque un an, au siège de La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon est face à un policier, il s’approche front contre front et il hurle. "La République, c'est moi", puis "Ne me touchez pas, ma personne est sacrée".

Le président des Insoumis lance aussi a ses soutiens "enfoncez-moi cette porte camarade". Enfin, à une amie qui lui suggère de se calmer il dit sèchement : "Toi on ne t’a rien demandé".

Le président de la France insoumise sera donc jugé jeudi et vendredi

L’effet est désastreux. Mélenchon apparaît comme un homme qui ne se maîtrise pas, et qui se croit au dessus des lois. Les conséquences politiques sont immédiates: forte chute de Jean Luc mélenchon dans les sondages, et dans les urnes. 19% à la présidentielle en 2017, 6% aux européennes. Les cris de Jean-Luc Mélenchon ne sont pas la seule explication mais ils ont pesé lourd.

Le président de la France insoumise sera donc jugé pour ces faits jeudi et vendredi par le tribunal correctionnel de Bobigny. Il est poursuivi, avec 5 de ses amis dont trois parlementaires, pour actes d’intimidations, rébellion et provocation. Il dit qu’il risque 10 ans de prison, ce qui est théoriquement vrai mais totalement absurde. On peut parier sans prendre de risque qu’aucune peine de prison ne sera prononcée. Mais sans doute plutôt une amende ou un simple rappel à la loi.

Passe d'armes Mélenchon-Dupond-Moretti

Les policiers qui s’étaient fait crier dessus en octobre dernier sont parties civiles et peuvent demander des dommages et intérêts. Ils s’étaient fait prescrire une semaine d'arrêt de travail pour traumatisme psychologique et pour les défendre à l’audience, l’Etat leur a offert les services de Maître Dupond-Moretti, un des avocats les plus efficaces mais aussi les plus cher de Paris.

Ce qui promet un beau duel. Mélenchon a déjà traité l’avocat de suppôt du macronisme. Dupond-Moretti lui a conseillé de se calmer et d’aller prendre une camomille.

Jean-Luc Mélenchon publie un livre qui sort jeudi, le jour de l’audience, pour dénoncer un procès politique.

Il est intitulé Et ainsi de suite, chez Plon. La meilleure défense c’est l’attaque, donc il y va fort contre la "police politique", la "justice politique". Il pose cette question: est-ce que la macronie est encore un état de droit. Et bien sur il répond que non.

Mais derrière des propos attendus et excessifs, il y a aussi les explications de sa colère

A propos des gilets jaunes et de cette femme Zineb Redouane qui est morte à Marseille touché par une grenade dans son appartement, il écrit: "Le régime fait tirer sur une femme de 83 ans au quatrième étage d’un immeuble". Comme si cette mort était intentionnelle !

Mélenchon ne fait pas dans la nuance. Et il fait ce que font tous les politiques lorsqu’ils sont attaqués par la justice. Il crie au complot. Mais derrière ses propos attendus et excessifs, il y a aussi les explications de sa colère et c’est plus intéressant.

Jean-Luc Mélenchon raconte les perquisitions lancées à l’aube au domicile de 11 de ses amis ou anciens assistants. Les policiers étaient armés et vêtus de gilets par balle. Chez un jeune homme, ils ne connaissent pas l’étage alors ils frappent à toutes les portes de l’immeuble en criant “Ouvrez, police”.

Chez une autre jeune femme, on fouille chaque chaussure, toute les poches des habits dans la penderie, les policiers démontent un meuble. Et le procès verbal, va mentionner la description du contenu du frigo, ainsi que le fait qu’il y a de la poussière dans la salle de bain.

Jean-Luc Mélenchon dénonce un viol de son intimité et de celle de ses amis

Au domicile de Jean-Luc Mélenchon, les policiers sont huit. Ce n’est pas rappelé dans le livre mais à sept heure du matin il vont constater la présence d’une femme dans l’appartement. Et ils vont noter son nom. Trois jours plus tard, le PV sera entre les mains de Mediapart qui jugera utile de publier ce nom.

Bref, Jean-Luc Mélenchon dénonce un viol de son intimité et de celle de ses amis. Des méthodes disproportionnées digne de la lutte contre le grand banditisme.

On peut ne pas le suivre lorsqu’il imagine un grand complot contre lui, on peut l’avoir trouvé effrayant lorsqu’il criait "La république c’est moi!". Mais on peut aussi l’entendre lorsqu’il raconte les méthodes de cow-boy ou lorsqu’il s’insurge contre le fait que la police saisisse tous les ordinateurs d’un parti d’opposition avec les secrets qu’ils peuvent contenir.

Certes c’était déjà arrivé à d’autres partis, souvent et de longue date. Mais ce n’est pas parce que ce n’est pas nouveau que ce n’est pas un problème.

Nicolas Poincaré