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Éboulement en Savoie: sécheresse, gélifraction... Le réchauffement climatique est-il en cause?

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La canicule et la sécheresse suivies de pluies intenses... L'enchaînenement de ces phénomènes métérologiques favorise la chute des blocs rocheux, et ce malgré les travaux de sécurisation des routes menés par les collectivités. "Il va y avoir de plus en plus d’éboulements de ce type", anticipe Dimitri Carbonnelle, expert en adaptation au changement climatique.

Des opérations étaient encore en cours jeudi pour stabiliser la roche, encore instable au dessus de la route nationale près de Chamonix, où une chute de rochers a tué un jeune pompier de la Somme et sa compagne, en vacances.

Des chutes de blocs qui peuvent provenir de la gélifraction: "C’est le gel et le dégel répétés à l’intérieur du bloc rocheux qui font que la paroi s’effrite. Il y a donc des gros blocs qui peuvent s’écrouler sur la route", explique sur RMC Dimitri Carbonnelle, expert en adaptation au changement climatique.

"L’eau qui était présente sous forme de glace en haute montagne va se transformer en eau et libérer des masses rocheuses qui, jusqu’à présent, étaient emprisonnées dans la glace", appuie Bastien Colas, du Bureau de recherches géologiques et minières. L'organisme pose notamment des capteurs sur les roches et réalise une cartographie satellite des secteurs sensibles.

"Précipitations significatives"

Dimitri Carbonnelle pointe également la responsabilité des pluies abondantes, qui ont joué un rôle de "lubrifiant" pour la roche. Des pluies dangereuses si elles surviennent après un épisode sécheresse. Le drame a eu lieu "après dix jours de canicule et au premier jour de précipitations significatives", fait savoir à l’AFP Ludovic Ravanel, géomorphologue et directeur de recherches au CNRS. Le "secteur est très fracturé avec une roche peu saine."

En ce sens, Serge Taboulo, président de l’Institut des risques majeurs, explique Le Parisien que le réchauffement climatique peut multiplier les épisodes chaleurs intenses suivies de fortes pluies, donc augmenter les risques d’éboulements.

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Des millions d'euros investis par les collectivités

Le Bureau de recherches géologiques et minières fait de la prévention en lien avec les collectivités pour permettre de mener à bien les travaux nécessaires de sécurisation. Rien qu’en Haute-Savoie, 80 km de routes départementales sont jugés à risque, dont 37 à très haut risque.

Toutefois, "il faut arrêter de croire qu’on peut tout maîtriser. Si on devait signer pour qu’aucun caillou ne puisse tomber, ce type de route serait fermée définitivement", peste auprès de RMC Jean-Marc Peillex, président de la communauté de communes Pays du Mont-Blanc.

Moins catégorique, Anne Lescurier, cheffe du service des risques naturels dans le département voisin de la Savoie, détaille les travaux de sécurisation des routes entrepris chaque année : "Terrassement de façon très importante, filets par blocs, ancrages… C'est toute une palette de travaux de protection contre les chutes de blocs."

"Il va y avoir de plus en plus d’éboulements de ce type", anticipe Dimitri Carbonnelle, expert en adaptation au changement climatique.

Malgré tout, les risques perdurent. En février, déjà en Savoie, un éboulement spectaculaire avait projeté deux énormes blocs sur la chaussée. Là aussi, il y avait des filets. Mais ces derniers n’avaient pas résisté aux 30 tonnes de roches. Ces chantiers ont déjà coûté 15 millions d’euros au département depuis le début de l’année, une somme qui a plus que doublé en dix ans.

Sécuriser les routes avant les JO 2030

La facture ne risque pas de baisser en raison du réchauffement climatique. "Il va y avoir de plus en plus d’éboulements de ce type. On le voit : il y a de plus en plus d’avalanches dans les montagnes, c’est vraiment lié à ça", assure Dimitri Carbonnelle. L'expert préconise des investissements massifs mais anticipe que certaines collectivités soient à court d'argent. Et ce alors que l'échéance des JO d'hiver 2030, organisés en France dans les Alpes, pourraient mettre encore plus à jour les risques liés à l'éboulement des roches.

Rachel Sadoddine et Léo Manson