Effondrements rue d'Aubagne: prison ferme pour des propriétaires, sursis pour l'ex-adjoint au maire

Les débris des immeubles effondrés rue d'Aubagne, à Marseille. - AFP
De premiers copropriétaires ont été condamnés lundi à de la prison ferme au procès des effondrements mortels de la rue d'Aubagne, la lecture du jugement ayant été brièvement interrompue par le malaise de l'un d'eux, dans une ambiance empreinte de douleur et d'émotion après ce drame du logement indigne dans lequel huit personnes sont mortes le novembre 2018.
Dans une salle archi-bondée de la salle des procès hors-norme du tribunal judiciaire de Marseille, le président Pascal Gand a commencé par relaxer six prévenus, trois copropriétaires du numéro 65 de la rue d'Aubagne et le bailleur social et deux de ses anciens dirigeants qui géraient le numéro 63 inoccupé.
Puis Sébastien Ardilly, qui était poursuivis avec ses parents, absents à l'audience, et leur SCI en tant que personne morale, a été appelé à la barre. "Le tribunal retient que vous étiez personnellement informés des désordres graves" au numéro 65 de la rue d'Aubagne et que "vous avez fait preuve d'une indifférence totale en exécutant pas les travaux" nécessaires, a commencé le président Pascal Gand.
"Ces fautes ont causé de façon indirecte et certaine la mort d'Ouloume Saïd Hassani", une mère comorienne démunie qui vivait dans cet appartement du centre-ville de Marseille avec ses deux fils, qui ont eux survécu et étaient présent dans la salle.
Un malaise à l'audience
Pendant que le magistrat énumérait ces fautes - travaux non réalisés dans le plancher, le plafond, fils électriques apparents, punaises de lit - Sébastien Ardilly a fait un malaise et l'audience a du être suspendue une quarantaine de minutes le temps que les pompiers lui prodiguent des soins. A la reprise le tribunal a annoncé sa condamnation à trois ans de prison dont un an ferme sous bracelet électronique, quatre ans dont deux ferme sous bracelet électronique pour son père Gilbert et trois ans avec sursis pour sa mère Martine.
Dans la foulée, c'est l'ancien adjoint au maire de Marseille chargé de l'habitat insalubre, Julien Ruas, qui a été condamné à 2 ans de prison avec sursis: "Vous ne vous êtes aucunement mobilisé pour mettre en place une politique volontariste de lutte contre les immeubles en péril", a estimé le président Pascal Gand en détaillant le jugement du tribunal correctionnel de Marseille, qui a également condamné l'élu à une peine complémentaire d'interdiction d'exercer une fonction publique pendant cinq ans.
Des travaux inefficaces voire contreproductifs
Six semaines de débats à l'automne avaient permis d'établir que les effondrements le 5 novembre 2018 des numéros 63 (vide) et 65 étaient inéluctables vu l'état du bâti. Mais aucune mise à l'abri des locataires du 65 n'avait été décidée et les travaux entrepris s'étaient avérés inefficaces voire contreproductifs.
Seize personnes morales et physiques ont été jugées pour différents délits, notamment homicide involontaire par violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité, un délit punissable de cinq ans de prison maximum, et soumission de personnes vulnérables dont au moins un mineur à des conditions d'hébergement indigne, des faits qui peuvent valoir jusqu'à dix ans d'emprisonnement.
Durant les débats, les prévenus avaient contesté en bloc, les avocats plaidant des relaxes en cascade.