Paris: une patiente vulnérable agressée sexuellement dans un hôpital, deux plaintes déposées

C’est une aide-soignante qui a surpris l’agresseur en flagrant délit. Le 27 juillet dernier, au sein du service de gérontologie de l’hôpital Sainte-Périne-Rossini à Paris, dans le 16ᵉ arrondissement, cette vacataire a ouvert par hasard la porte de la chambre d’une patiente et l’a découverte dans son lit avec un autre malade dénudé et allongé contre elle, selon les informations recueillies par RMC.
Appelée en urgence, une médecin a également été témoin des faits et a intimé l’ordre au patient de se rhabiller et de retourner dans sa chambre, située au même étage. La victime, une femme trisomique âgée de 50 ans, souffre de la maladie d’Alzheimer et a perdu l’usage de la parole.
Sa mère, Christina (prénom d’emprunt), qui est aussi sa tutrice, a été prévenue par l’équipe médicale dès le lendemain, lui assurant que des mesures avaient été prises. Or, quelques jours plus tard, en venant rendre visite à sa fille, Christina est stupéfaite: "Je sors de l’ascenseur et devant la porte de la chambre de ma fille, je retrouve ce monsieur", raconte-t-elle à RMC.
Pas de signalement à la justice
Près d’un mois après les faits, le 23 août, Christina est reçue pour une réunion d’information en présence notamment d’une membre de la direction hospitalière et d’un responsable du service, lui-même médecin traitant du patient mis en cause.
Lors de cet échange enregistré par Christina et dont RMC révèle des extraits anonymisés, la représentante de la direction explique à la mère de la victime que les faits peuvent “être qualifiés par un juge ‘d’agression sexuelle”, tout en expliquant que l’hôpital n’a pas encore signalé ces faits à la justice, comme il en a pourtant l’obligation légale.
“Pour l’instant, nous n’avons pas fait ce signalement au procureur, c’est une question que l’on se pose sérieusement…”, dit-elle.
En réalité, les responsables de l’hôpital Sainte-Périne-Rossini n’ont jamais saisi le parquet de Paris, ce qui a notamment incité Christina à porter plainte fin octobre au nom de sa fille pour viol sur personne vulnérable.
“Je suis quelqu’un qui respecte les institutions et je leur fais confiance. J’attendais qu’ils fassent quelque chose. Et puis je me suis rendue compte qu’ils ne font rien. Il (l’agresseur présumé, ndlr) est toujours là et ma fille continue d’être sous la même menace”, déplore la mère de la plaignante au micro de RMC.
“Il est responsable pénalement”
Dès la réception de cette première plainte, le parquet de Paris a immédiatement ouvert une enquête préliminaire, confiée au 1er district de la police judiciaire parisienne.
Cette enquête doit notamment “préciser la matérialité et la qualification” des faits, précise à RMC le parquet de Paris, ajoutant que “l’homme suspecté étant lui-même interné en psychiatrie depuis de nombreuses années, des éléments médicaux sont à recueillir avant toute audition”.
Une expertise devrait être menée pour savoir si le patient mis en cause est apte à être interrogé. Lors de la réunion du 23 août, le médecin traitant de cet homme avait affirmé: “Ce monsieur n’a pas bonne conscience de ce qu’il fait, même s’il est responsable pénalement”.
Déjà deux “doutes” en dix ans
Toujours lors de cette réunion fin août, le responsable du service a expliqué à Christina que son patient a déjà été soupçonné de faits similaires par le passé.
“Il y a eu deux épisodes en dix ans où on a eu un doute sur quelque chose de ce type-là, de l’ordre de l’agression sexuelle. (…) Cela ressemblait un peu à ce qu’il y a eu avec (votre fille)”, déclare-t-il avant d’estimer un peu plus tard que “ce n’est pas un grand récidiviste, je ne suis pas sûr qu’il soit très dangereux”.
À l’époque, ce médecin disait également s’interroger sur l’opportunité et les conséquences éventuelles d’un éloignement de la patiente ou du malade mis en cause, "parce que les laisser sur le même étage, c’est entretenir un certain nombre de risques", soulignait-il.
Finalement, aucune mesure de cet ordre ne semble avoir été prise, selon Christina, qui assure apercevoir régulièrement cet homme lorsqu’elle vient rendre visite à sa fille.
Elle a donc déposé une seconde plainte début décembre pour “non-assistance à personne en danger” contre l’hôpital, à qui elle reproche de “ne prendre aucune mesure pour protéger (sa) fille”.
Ses avocats, Alexandre Lobry et Laura Abecassis, dénoncent une confiance rompue avec l’établissement hospitalier et souhaitent également l’ouverture d’une enquête administrative afin de comprendre “pourquoi les faits n’ont pas été signalés au procureur de la République et pourquoi des mesures n’ont pas été prises pour protéger la patiente”.
Contactée par RMC, l’AP-HP, dont dépend l’hôpital Sainte-Périne-Rossini, n’a pas souhaité répondre à nos questions ni faire de commentaire. Le patient mis en cause dans cette affaire reste présumé innocent.