Féminicide à Mérignac: ce que contient le rapport accablant sur les dysfonctionnements administratifs
Chainez, 31 ans, a été brûlée vive et tuée par son conjoint violent dans la rue au vu et su de tous début mai à Mérignac (Gironde). Plus d'un mois après, le rapport d'inspection sur le suivi du suspect est accablant pour l'administration.
Le suspect avait été condamné en juin 2020 à 18 mois de prison, dont 9 mois fermes pour des violences sur sa compagne, Chahinez. Il a l’interdiction de la voir, et de la contacter. Mais depuis sa cellule il lui envoie une lettre, l’appelle plusieurs fois par jour, jusqu’à 15 fois, lui exprime son souhait de la revoir à sa sortie de prison.
Chahinez porte plainte dans la foulée. Première défaillance : la police et la prison n’informent la justice qu’en décembre 2020. Entre temps, le suspect est déjà dehors, il bénéficie d’un aménagement de peine, et Chahinez n’est en plus pas au courant de cette libération anticipée.
La dangerosité du suspect sous-estimée?
En mars dernier, 2 mois avant que Chahinez ne soit tuée, le suspect l’agresse violemment. Elle porte plainte et doit, comme le veut la procédure, remplir une grille d’évaluation du danger, on lui demande si elle craint de nouvelles violences, elle répond oui. Mais sur la fiche que remplit l’agent de police, il est inscrit non.
Ces documents sont envoyés au parquet de Bordeaux, mais ils sont illisibles, remplis d’incohérences: ils ne permettent pas de signaler un quelconque danger, le parquet demande des précisions par mail, aucune réponse ne lui est donné.
Plus d'une dizaine d'autres défaillances
Il y a beaucoup d’autres défaillances, on parle de plus d’une dizaine au total. A noter également l'absence de suivi psychologique du suspect malgré ses nombreux antécédents judiciaires et son addiction à l'alcool.
L'absence également de la mise en place d'un téléphone grave danger pour Chahinez. Les nombreuses défaillances n'ont pas permis de la placer comme personne à protéger. L'administration pénitentiaire avait noté que le suspect n'avait pas réalisé la gravité des violences qui lui avait valu sa condamnation. Rapports qui n'ont pas été suivi d'effet notamment sur sa demande d'aménagement de peine
Alors que le suspect est recherché après les violences commises sur Chahinez en mars, le suspect a également continué à se rendre à ses rendez-vous de suivi judiciaire. La police n’est pas au courant, et ne l’interpelle pas. Les signaux d’alerte étaient nombreux, mais le manque de communication entre les acteurs policiers et judiciaire n’a pas permis d'arrêter le suspect à temps.
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