"Il revient de très loin": passé tout près de la peine de mort en Indonésie, Serge Atlaoui en liberté conditionnelle

"Il revient de très, très loin". Le Français Serge Atlaoui va retrouver la liberté dans quelques jours. Condamné à mort en Indonésie pour narcotrafic, Serge Atlaoui a vu sa demande de libération conditionnelle validée par la justice française, après presque 20 ans de détention, dont la majeure partie en Asie. Il avait été arrêté en 2005, puis rapatrié dans l'Hexagone en janvier dernier.
"Il est très heureux. Il y a quand même des moments où la peine de mort était en voie d'être exécutée dans les couloirs de la mort en Indonésie. On l'a sauvé", a confié sur RMC son avocat Me Richard Sédillot.
Artisan soudeur, originaire de Metz et père de 4 enfants, Serge Atlaoui est arrêté le 11 novembre 2005 dans une usine de Jakarta, la capitale de l'Indonésie, où il travaille. La police a découvert des dizaines de kilos de drogue dans l'usine. Le Français affirme qu’il ignore tout de l’activité clandestine de l’usine et qu’il pense travailler pour une fabrique d’acrylique. En réalité, l'entreprise produisait de l’ecstasy.
Serge Atlaoui est alors accusé d’être le "chimiste" du laboratoire. À l’issue d’un procès sans traducteur, selon le Quai d’Orsay, il est condamné à la prison à vie, puis en appel, à la peine de mort.
Robert Badinter et François Hollande interviennent
L'affaire va susciter une forte mobilisation en France. Robert Badinter, artisan de l'abolition de la peine de mort, lui trouve lui-même un avocat. En Indonésie, Atlaoui multiplie les recours pour retarder l'exécution. Jusqu’en 2015, lorsque la Cour constitutionnelle rejette sa demande de révision. Toutes les voies d’appel sont alors épuisées.
Son exécution est annoncée comme imminente. Son avocat raconte même que son cercueil est préparé. Sa femme dit vivre "une torture psychologique intense" et ses proches demandent au président de la République François Hollande d'agir.
Ce dernier prend la parole publiquement. L’affaire est discutée entre chefs d’État. Le président socialiste menace le pays de "conséquences économiques" en cas d'exécution. La pression diplomatique va payer. Quelques jours plus tard, le nom de Serge Atlaoui est retiré de la liste des exécutés, au tout dernier moment. Mais il s'agit là d'un "sursis" temporaire, qui va durer des années. Pendant 10 ans encore, Serge Atlaoui va rester détenu dans sa prison de Jakarta.
Ses avocats demandent la grâce présidentielle
Les choses n’ont bougé que l’hiver dernier, lorsque la France et l’Indonésie, à la faveur d’un rapprochement diplomatique, ont conclu un accord. Ce dernier, qui a été signé par les ministres de la Justice, prévoit le retour à Paris de Serge Atlaoui. Un geste "humanitaire" pour Jakarta car Serge Atlaoui est malade. Il doit suivre, chaque semaine à l'hôpital, un traitement contre le cancer.
L'homme de 61 ans n’est pas pour autant gracié. La justice française transforme sa peine en 30 ans de prison. Incarcéré depuis janvier en Seine-et-Marne, Serge Atlaoui va pouvoir poursuivre sa peine en liberté conditionnelle, sous le contrôle de la justice.
La mesure sera effective vendredi. "L'immense majorité des gens ont compris qu'il n'y avait aucun élément dans le dossier qui permet de considérer qu'il aurait été coupable", a affirmé son avocat Me Richard Sédillot. Ses avocats ont déposé une demande de grâce présidentielle qui dispenserait Serge Atlaoui des obligations fixées par la justice.