"L'histoire de France s'écrit aussi en prison": l’avis tranché d’Arthur Chevallier

Le Premier ministre, Michel Barnier, a déroulé son programme sécuritaire, ce mardi à l’Assemblée nationale. Il a longuement abordé la situation carcérale, en promettant notamment plus de places de prison, mais aussi des "peines de prison courtes" pour certains délits. Et Michel Barnier a bien fait. Car l’histoire de France s’écrit aussi dans les prisons. Le Premier ministre est revenu sur les règles du Monopoly de la justice en essayant de rendre la case prison inévitable. Du moins, quand ça le mérite. Il a tout simplement remis l’incarcération au cœur du système pénal, en rappelant que les peines prononcées devaient être exécutées. Il en va de la crédibilité de notre modèle judiciaire.
C’est quand même paradoxal puisque d’après le ministère de la Justice, il n’y a jamais eu autant de gens en prison. Avec une surpopulation record, qui atteint parfois les 200% dans certains établissements. Avouez quand même que, pour un pays comme la France, c’est un peu la honte sur la scène internationale. On a été condamnés deux fois par la Cour européenne des droits de l’homme pour "traitements inhumains et dégradants". Et, au classement de la surpopulation carcérale, on est carrément troisième derrière… Chypre et la Roumanie. Pour un pays qui fait commerce de son respect des droits de l’homme et de son humanisme, ce n’est pas glorieux. On peut sûrement s’améliorer.
La prison, un symbole et le miroir du pouvoir
L’histoire de France s’est beaucoup jouée à travers ses prisons. Tout a commencé un certain 14 juillet 1789 où nous avons fait tomber une forteresse qui s’appelait la Bastille. Alors, quand elle a été prise, il y avait seulement sept prisonniers. Mais symboliquement, c’est important puisque le roi pouvait y envoyer n’importe qui sans avoir à rendre de comptes. C’était un symbole de l’arbitraire. Après ça, la Révolution va réglementer les peines pour qu’elles correspondent à des condamnations encadrées par la loi. C’est ce qu’on appelle, et c’est d’actualité, l’Etat de droit. A partir du XIXe siècle, on crée des bagnes en Nouvelle-Calédonie et en Guyane, où on envoie des condamnés pour travaux forcés. Les conditions de détentions inhumaines provoqueront l’indignation. A commencer par Victor Hugo, qui en parle beaucoup dans son roman Les Misérables, et le héros de son livre, c’est un ancien bagnard. Les bagnes ne seront supprimés qu’en 1946. Et les derniers bagnards ne reviendront qu’en 1953…
La prison, c’est toujours un symbole, c’est même le miroir du pouvoir en place. Ça pourrait se résumer par: dis-moi comment sont tes prisons, je te dirai quel genre de gouvernement tu es. Donc le Premier ministre a raison de vouloir les remettre au cœur du système pénal. Ça lui permet de répondre à plusieurs problèmes à la fois: l’insécurité, la sévérité et aussi notre réputation mondiale. Durcir le ton sur les incarcérations et améliorer les conditions de détention, c’est peut-être ça, la clé du succès.